La fonction RH est l’une des rares fonctions à vivre de perpétuelles r-évolutions. Celles-ci sont principalement dues à des modifications ou innovations législatives (modifications du code du travail, évolutions du traitement de la paie, prélèvement à la source, modernisation de la collecte des éléments de paie par l’état, réforme de la formation, égalité femme homme, etc.).
Mais pas seulement. Le DRH doit aujourd’hui pouvoir répondre aux besoins de ses salariés : et leurs besoins ont évolué à vitesse grand V, parce qu’ils ont pris certaines habitudes de vie !
Une vie digitalisée…
Le salarié est avant tout un individu qui vit avec son temps, il est connecté, informé et attend un service rapide et de qualité. A ce titre, il s’est approprié depuis plusieurs années les outils digitaux mis à sa disposition pour lui faciliter la vie, l’informer et le divertir à travers les réseaux sociaux, les applications mobiles, les services bancaires en ligne, les plateformes de vidéos en ligne… Instagram, Facebook, Twitter, Uber, Uber eat, Netflix, Amazon Prime ou encore Booking et Airbnb sont devenus des outils usuels.
Dans ce contexte, bon nombre d’entreprises vivent aujourd’hui le paradoxe suivant :
Les moyens mis à disposition par l’entreprise pour travailler et communiquer ne sont pas à la hauteur des moyens utilisés par leurs propres salariés dans la vie courante.
Et, face à ce constat, les risques sont nombreux :
- Manque d’intérêt au travail lié à des processus et outils dépassés et pénibles pour le salarié, provoquant un désengagement et un manque de motivation
- Difficultés à recruter de nouveaux talents, qui ne veulent pas rejoindre une entreprise qui n’est pas « à la page »
- Impact direct sur le bien-être des équipes qui passent beaucoup trop de temps sur des tâches pénibles et à faible valeur ajoutée (traitement bureautique, Excel, classement de dossier).
La solution : le digital ! Le digital est-il donc l’eldorado du bien-être au travail, celui qui permettra de remotiver les troupes et de gagner l’engagement de collaborateurs parfois désabusés ? Mais est-il si facile de digitaliser une fonction longtemps considérée comme la 5ème roue du carrosse ?
Et pour autant, est-il si facile de digitaliser la fonction RH ?
A priori, sur le papier, oui, car les SIRH ont évolué eux-aussi ces 5 dernières années.
Les éditeurs ont enfin compris l’importance de l’interface utilisateur et beaucoup d’investissements ont été réalisés en ce sens pour offrir des « expériences utilisateur » dignes de ce nom.
De plus, les solutions du marché RH sont à 90% proposées en mode SaaS et ne nécessitent plus des délais de mise en place démentiels et donc des équipes surdimensionnés pour mener à bien les projets.
Et enfin, les coûts ont grandement diminué. Moins de ressources pour implanter, donc moins de coûts de mise en place des applications. Quant aux coûts des abonnements aux solutions Saas, le marché est suffisamment riche en solutions pour faire jouer la concurrence.
Bref, tous les signaux sont au vert pour enfin digitaliser cette fonction RH et offrir aux acteurs de l’entreprise des outils performants et qui leur faciliteront le quotidien.
Le marché des SIRH semble mature et abordable pour les DRH. C’est donc le moment idéal pour lancer son projet de digitalisation RH.
Quels seraient les freins à cette digitalisation de la fonction RH ?
Le premier frein pourrait être la capacité des salariés à utiliser les nouvelles applications. On ne peut plus dire que les salariés ne sont pas prêts à utiliser des outils digitaux, ils le font quasi quotidiennement dans leur vie privée. Donc a priori la formation des salariés à ces outils n’est pas un frein en termes de capacité à utiliser les applications offertes par la DRH. Tout l’enjeu du projet résidera donc dans la capacité des équipes RH à bien « vendre » les solutions RH auprès des utilisateurs finaux.
Il sera important de bien marketer les solutions et d’expliquer leurs usages et les bénéfices que les utilisateurs pourront en tirer, car si les salariés et les managers n’y voient pas un véritable intérêt par rapport à leur job ou pour leur carrière, ils finiront par délaisser l’application.
Le deuxième frein pourrait être d’ordre budgétaire, la direction des ressources humaines n’étant pas la plus riche des directions en entreprise. Même si les coûts ont baissé sur le marché SIRH, la DRH devra convaincre et démontrer le retour sur investissement de son projet.
Le troisième frein serait celui de la compétence de la DRH en matière de projet digitaux, car ce n’est clairement pas son métier de base. Il sera donc nécessaire de travailler main dans la main avec la DSI afin de faire les bons choix technologiques et garder une cohérence globale en matière de systèmes d’information de l’entreprise.
En conclusion
D’un point de vue conjoncturel, c’est le bon moment pour digitaliser la fonction RH, le marché est propice, les salariés sont pour la plupart déjà habitués à l’usage du digital, mais…
… mais la DRH devra bien préparer son projet, et, tout d’abord, le défendre et le vendre à sa Direction générale.
… mais la DRH devra aussi trouver le temps, car le digital n’est qu’un des nombreux projets à traiter par la fonction RH.
Tout est une question de priorité : lorsque les RH auront compris que le digital a un impact direct sur toutes leurs problématiques, ils finiront par en faire leur priorité.
Car le digital permet aussi de traiter des questions d’optimisation des processus, de mise à disposition d’information, de reporting, d’outil d’aide à la décision.
Globalement, le digital permettra d’apporter un service plus rapide, de meilleure qualité (si les datas ont été injectées avec soin dans les applicatifs), et donc, de mieux travailler, d’être plus efficace et enfin, d’augmenter le niveau de satisfaction de l’ensemble des salariés… RH inclus !
Christophe PATTE