Les entreprises pionnières en matière de RH 2.0 ont appris en marchant, en explorant les technologies et les usages. Dans un environnement mutant en permanence elles n’hésitent pas à remettre régulièrement le sujet sur la table. Deux early adopters, Franck La Pinta (Société Générale) et Vincent Rostaing (Le Cairn 4 IT), partagent leur expérience et vous guident dans le choix de votre conseil RH 2.0.
Un conseil RH 2.0, qu’est-ce que c’est ? Un conseil qui est initialement un conseil RH et doit le rester, qui, selon Vincent Rostaing, fondateur du cabinet Le Cairn 4 IT, « doit avoir conscience des enjeux et contraintes de la sphère RH ». Une sphère RH bien vaste, c’est pourquoi Franck La Pinta, responsable Marketing Web et RH 2.0 chez Société Générale, questionne encore : « Le conseil RH 2.0 recoupe plusieurs dimensions. De quoi telle entreprise a-t-elle besoin ? De conseil RH pur, de conseil en communication RH, de conseil à l’utilisation des réseaux sociaux ? Derrière ces différents axes, on trouve de multiples prestataires. » Très nombreux prestataires en effet, dont certains sont de vrais professionnels, des RH et du collaboratif, quand d’autres, autoproclamés experts, surfent sur le sujet. Pour débroussailler le terrain, procédez par étape et gardez à l’esprit qu’un bon conseil RH 2.0 arrive avec plus de questions que de réponses.
Un conseil RH 2.0, pour quoi faire ? Sachant que les pionniers s’en sont passés, vous pourriez être tenté de les imiter. « Ce serait vous priver d’années d’expérience. Un conseil RH 2.0 fait gagner du temps et vous permet d’éviter des écueils qui peuvent coûter très cher », répond Vincent Rostaing. De son côté Franck La Pinta tempère : « Quand on débute sur Twitter par exemple, si on dit une bêtise, on ne la dit qu’à trois followers. La courbe d’expérience croit en même temps que son audience le risque est donc limité. Et tester soi-même permet de mieux évaluer son prestataire. »
Mettre à plat son organisation, son fonctionnement, son management
Indispensable première étape, cette mise à plat permet d’abord de pointer les incohérences éventuelles d’un projet. Exemple : l’entreprise veut faire du collaboratif mais fixe des objectifs individuels. Elle permet aussi de recenser les ressources internes dotées des compétences dont elle aura besoin pour accompagner sa démarche RH 2.0. « Actuellement, il n’y a pas vraiment de formation. Il s’agit plus de repérer des personnes ayant une appétence pour ce sujet, on peut les trouver dans la communication ou la communication RH », explique Franck La Pinta. Des personnes s’intéressant à titre personnel à ces sujets (marque employeur, entreprise 2.0…), tenant un blog, même hors sujet, signe d’un intérêt pour le digital peuvent également convenir. « Quand on dispose en interne d’une compétence RH/com’/digitale, on a moins besoin d’un conseil externe », pointe-t-il.
Question à se poser :
- Internaliser ou externaliser certaines ressources ? Selon Franck La Pinta, l’entreprise a intérêt à internaliser un certain nombre de ressources : « C’est le seul moyen d’avoir des personnes qui connaissent la culture, l’organisation, les métiers, l’actualité de l’entreprise ; qui sachent aller chercher l’information en interne, car elles savent qu’elle existe déjà et qu’elle peut être utilisée sur des espaces communautaires. » Cependant, pour le travail de veille et de benchmark – qui s’effectue aussi sur le terrain car il importe d’aller à la rencontre des personnes et des idées –, le recours à un prestataire est intéressant car, ayant moins la tête dans le sujet, il repère plus de choses.
Enfin, les RH 2.0 réunissant plusieurs sujets, il peut y avoir des adhérences avec le corporate et ses prestataires. L’entreprise peut aussi s’intéresser aux pros du marketing digital : « Les usages et fonctionnalités des outils évoluant sans cesse, de nouveaux outils arrivant régulièrement, ces compétences peuvent être intéressantes pour s’adapter rapidement aux évolutions technologiques et faire le tri », complète-t-il.
Savoir vraiment pourquoi vous voulez aller vers le 2.0
Mais ne nous attardons pas sur les outils, parlons plutôt stratégie car sans elle leur utilisation a de fortes chances d’être contreproductive. Nombre d’entreprises disent : Nous avons peur d’aller sur les réseaux sociaux. Ou : Nous voulons y aller mais nous ne savons pas comment. « Qu’elles le veuillent ou non, les entreprises sont déjà dans le 2.0. Si elles restent dubitatives, il suffit de leur montrer que leurs salariés ne les ont pas attendues dans la sphère publique – ils sont sur les réseaux et parlent de leur entreprise – et la sphère privée dans laquelle ils utilisent déjà des outils collaboratifs », pointe Vincent Rostaing. La démarche demande de faire passer la réflexion stratégique avant le choix des outils, car aucun outil, aucun réseau n’a qu’un seul usage. »
Questions à se poser :
- Mon projet est-il défensif ? (Tous mes concurrents y sont.)
- Est-il offensif ? (Pour me démarquer, pour aller vers des niches.)
- Mon but est-il de fédérer mes équipes pour me donner du poids face à un gros concurrent ?
- Est-il de me positionner en tant que recruteur ?
- La question de l’image employeur est-elle centrale ? (Une présence sur les réseaux peut me permettre de montrer à mes salariés que mon entreprise bouge, qu’elle s’inscrit dans le mouvement actuel ; c’est un argument de fidélisation.)
Arrivé à ce stade de questionnement, permettant l’émergence de réponses, vous pouvez plus clairement savoir à quel type de conseil RH 2.0 faire appel – sachez que le fait de ne pas connaître l’univers 2.0 n’empêche pas d’exprimer clairement ses besoins. Enfin, comme le souligne Vincent Rostaing, « le conseil RH 2.0 doit permettre de mesurer les impacts organisationnels, en termes de fonctionnement, de ressources et de moyens. Et à propos de moyens, il ne faut pas partir avec en tête l’idée de la gratuité des réseaux – gratuité relative pour certains –, car elle n’inclut pas la gratuité de la démarche qui, elle, nécessite des ressources. »
Les bonnes questions à poser à un conseil RH 2.0 selon Franck La Pinta
« Avant de le questionner, l’écouter pour juger de la pertinence de son discours et de la profondeur de sa réflexion. Cela permet de faire la différence entre ceux qui vendent des outils et ceux qui vendent du conseil ou qui pensent stratégie. Ensuite, lui demander s’il a une connaissance de mon secteur, une curiosité pour mon métier. Il est également utile de le solliciter sur de petits projets, pas forcément sur des plans stratégiques globaux, cela permet de le tester sur un périmètre restreint. En outre, le questionner sur ses réalisations fait tout de suite ressortir la dimension des projets sur lesquels il est intervenu. Enfin, une agence de conseil RH 2.0 qui n’a aucune présence sur les réseaux sociaux doit immédiatement éveiller vos doutes, de même qu’un interlocuteur qui n’a qu’une très faible audience sur les différentes plateformes. »
Sophie Girardeau