Certains contrats de travail prévoient une clause de non-concurrence. Elle permet à l’entreprise de se protéger contre la concurrence d’un ancien salarié qui irait travailler chez un concurrent ou à son compte. En contrepartie de cette restriction de liberté, le collaborateur perçoit une compensation financière.
Les règles de cette clause sont principalement issues de la jurisprudence et les contentieux sont nombreux. En effet, l’objectif est d’éviter que le salarié ne concurrence son ex-employeur mais pas de l’empêcher de travailler. Il s’agit donc de trouver un équilibre entre l’intérêt de l’entreprise et la liberté de l’employé.
Pour mettre en place une telle disposition, l’employeur doit donc respecter des conditions précises. À la rupture du contrat, deux cas peuvent se présenter : soit la clause de non-concurrence est mise en œuvre, soit l’entreprise choisit d’y renoncer.
La mise en place de la clause de non-concurrence
Contrat de travail ou convention collective
La clause de non-concurrence peut être prévue :
- Lors de la conclusion du contrat
- Ou être rajoutée par la suite
Dans tous les cas, le salarié doit l’accepter de manière claire et non équivoque (Cass. Soc. 1-4-2020 n°18-24.472).
La mention dans le contrat de travail n’est pas pour autant obligatoire. Les parties peuvent être liées par une clause prévue dans la CCN à condition que celle-ci soit obligatoire et que l’employé ait pu en prendre connaissance lors de son embauche.
Les conditions de validité de la clause de non-concurrence
La clause de non-concurrence doit être indispensable à la protection des intérêts de l’entreprise. Elle doit également être limitée dans le temps et l’espace, tenir compte de l’activité de l’employé et prévoir une contrepartie financière. Ces conditions sont cumulatives (Cass. Soc. 10-7-2002 n° 00-45.135).
L’intérêt de l’entreprise
Cette disposition limite la liberté individuelle du salarié. Une telle atteinte n’est justifiée que si elle est nécessaire à la protection des intérêts de l’entreprise.
Par exemple : collaborateurs ayant connaissance d’informations sensibles ou en contact avec la clientèle (responsable d’une agence de voyage, Cass. Soc. 20-6-1995 n° 93-40.28).
En revanche, la cour de cassation a rejeté cette clause pour un télévendeur ou encore un laveur de vitre (Cass. soc. 14-5-1992 n° 89-45.300).
Limitations de la clause
La clause de non-concurrence doit mentionner :
- Une durée d’application, raisonnable et adaptée à la situation (quelques mois, 1 an…).
- Une zone géographique. La clause peut prévoir une application dans une zone kilométrique autour de l’entreprise, dans l’agglomération, le département, etc.
- Une activité spécifique. La clause doit également viser un emploi ou une fonction précise. Par exemple, l’interdiction d’occuper le poste de responsable d’agence d’intérim. L’employé concerné est alors libre d’occuper un autre poste.
Indemnités du salarié
La contrepartie financière est obligatoire. Elle est prévue par le contrat de travail ou par la convention collective.
Le montant doit être substantiel. Il correspond environ à une fourchette comprise entre 25% et 50% du salaire mensuel, à verser pendant toute la durée de la clause.
L’absence d’indemnité ou un montant dérisoire entraine la nullité de la clause (Cass. soc. 29-1-2003 n° 00-44.882). De même si la contrepartie est diminuée selon le mode de rupture du contrat ou son motif (Cass. soc. 8-4-2010 n° 08-43.056).
Application de la clause de non-concurrence
Limitation possible à certains motifs de ruptures
L’employeur peut limiter l’application de la clause de non-concurrence à certaines ruptures : en cas de démission ou faute grave par exemple.
Cette possibilité doit être expressément indiquée dans le contrat de travail.
Point de départ
La clause de non-concurrence s’applique dès la fin du préavis si ce dernier est effectué. En cas de dispense du préavis, elle commence dès le départ du salarié.
Versement de l’indemnité
La plupart du temps, la contrepartie financière est versée mensuellement. Elle est considérée comme un salaire et est donc soumise à cotisations sociales, CSG, CRDS et impôts sur le revenu.
Renonciation de l’employeur
Une fois le contrat de travail rompu, l’employeur a la faculté de renoncer à la clause de non-concurrence.
Dans quelles conditions ?
Cette possibilité de renonciation est prévue par le contrat de travail ou la convention collective. Dans le cas contraire, l’accord du salarié est indispensable.
L’employeur doit informer individuellement le salarié de manière explicite. Le contrat ou la CCN prévoient généralement les modalités de cette renonciation (lettre recommandée par exemple).
Si l’entreprise ne respecte pas ces formalités, il devra verser l’indemnité prévue (Cass. Soc. 13-10-1988 n° 85-43.261).
Le délai à respecter
L’employeur ne peut pas renoncer à la clause à n’importe quel moment.
Si le délai est fixé par le contrat de travail ou la convention collective, il doit le respecter. La plupart du temps, la renonciation intervient au moment de la rupture du contrat ou dans un certain délai à compter de celle-ci.
Si le contrat ou la CCN sont muets sur ce point, l’employeur ne peut y renoncer qu’au moment de la rupture du contrat.
Conséquences de la renonciation
La levée de la clause de non-concurrence libère les deux parties de leurs obligations :
- L’employeur n’est plus tenu de verser la compensation financière
- L’ex-salarié retrouve toute liberté pour être embauché sans aucune restriction
Céline Le Friand