Avec la démocratisation des smartphones et le développement du télétravail, les cadres sont désormais sollicités de toutes parts et à tous les moments pour faire face à leurs missions et autres obligations professionnelles. Comment séparer dès lors la vie professionnelle de la sphère privée ? Le temps de travail des cadres n’aurait-il aujourd’hui plus aucune limite ? Etat des lieux.
- Pour aller plus loin : Le burn-out comme maladie professionnelle ?
Selon l’enquête CFDT Cadres intitulée « Travail et temps, comment maintenir les équilibres ? », 24 % des cadres interrogés déclarent travailler plus de 10 heures par jour.
« Les cadres font de longues journées, ce n’est pas nouveau ! Cependant l’usage généralisé des outils de communication crée l’omniprésence du lien avec l’employeur, les collègues et parfois les clients. De ce fait, le temps de travail, les temps de repos et la vie privée s’entremêlent », précise Laurent Mahieu, secrétaire général adjoint CFDT Cadres.
Un constat partagé par les cadres qui confirment pour 73 %, que le travail à domicile est devenu le prolongement naturel d’une journée en poste. Une volonté pour la moitié d’entre eux et une véritable contrainte pour l’autre moitié, qui face à la quantité de travail à sa charge n’a pas d’autre choix que de poursuivre son activité professionnelle dans le cadre de sa vie personnelle.
« Les premiers concernés par ce débordement sont ceux qui ont des responsabilités d’encadrement, et notamment les managers. Ils sont tellement sollicités sur leur temps effectif de travail, qu’ils n’ont pas d’autre choix que de prolonger leur activité à domicile. Il s’agit en effet du seul moment où ils peuvent gérer certains dispositifs professionnels sans être sans cesse dérangés », commente Laurent Mahieu.
Du côté des jours de repos et de l’opportunité de reprendre son souffle, les possibilités réelles de poser des jours dans un contexte professionnel toujours plus intense ne concernent que les deux tiers des cadres. 65 % des hommes disent pouvoir prendre tous leurs jours de repos, contre 62 % des femmes. Parallèlement, 23 % ne sont pas en capacité d’en prendre la totalité contre 20 % pour les hommes.
« Pour ceux-là, la combinaison de journées très longues et d’une charge de travail trop lourde empêche la possibilité de faire une pause. Ces contraintes impliquent une vie familiale quasiment inexistante et une situation particulièrement inquiétante. D’ailleurs, 10 % des cadres se déclarent à la limite de la situation de rupture, du burn-out », atteste le secrétaire général adjoint CFDT Cadres.
60 % des jeunes cadres veulent des règles d’usage pour la « déconnexion »
Si en 2002, lors d’une enquête basée sur la « déconnexion temporelle et technologique », 44 % des cadres étaient favorables à un droit à la « déconnexion » pour protéger leur vie privée, ils étaient lors d’un récent sondage réalisé par l’Apec et la CFDT Cadres, 60 %, à solliciter des négociations de règles d’usage des nouvelles technologies.
Des chiffres qui démontrent la nécessité et le besoin de plus en plus croissant des cadres d’établir une frontière claire entre leur vie privée et professionnelle. En ce sens, la CFDT Cadres propose une négociation annuelle obligatoire (NAO) sur les technologies de l’information et de la communication.
Elle permettrait de négocier collectivement l’usage des messageries et des intranets d’entreprise et d’établir les limites à respecter dans les échanges hors horaires normaux de travail, particulièrement pour les messages provenant de la hiérarchie. « Dés à présent, les entreprises doivent prendre en compte cette nécessité d’établir une barrière entre vie professionnelle et vie privée notamment pour les managers. Aujourd’hui, cette fonction apparaît pour beaucoup comme un faisceau de contraintes. Elle attire d’ailleurs de moins en moins de jeunes cadres…
Si les entreprises ne donnent pas plus de temps libre aux managers, elles rencontreront, à terme, de véritables difficultés pour régénérer cette population… », conclut Laurent Mahieu.
Gérald DUDOUET