Malgré une légère baisse de régime par rapport à 2007, le secteur de la formation continue enregistre un bilan positif, publié par la DARES en août dernier, au regard de la croissance du nombre d’organismes et du chiffre d’affaire. Mais ce bilan est nuancé en fonction des secteurs. L’activité reste concentrée du côté des géants de la formation : le secteur privé à but lucratif.
La formation continue : victime de la crise ou en pleine expansion ? Si l’on se fie aux seuls résultats du secteur privé, les principaux prestataires, l’activité ne semble avoir été qu’effleurée par la crise. « C’est essentiellement grâce à eux et notamment grâce au secteur privé à but lucratif que le dynamisme global du secteur se maintient en termes de chiffre d’affaires », confirme la DARES (1) . La nuance n’est pas anodine. Pris dans son ensemble, sans distinction donc entre le privé à but lucratif, non lucratif et les formateurs individuels, le secteur représente 94% des organismes, qui réalisent à eux seuls les ¾ du CA global et forment 81% des stagiaires.
Ce sont les prestataires du privé à but lucratif qui tirent la couverture à eux. En 2008, leur nombre s’est accru de 5% et leur chiffre d’affaires de 8%, par rapport à l’année précédente. « Ils représentent 36% du total des organismes, soit 1 point de plus qu’en 2007 et leur chiffre d’affaire pèse pour 40% du total », rapporte la DARES. Selon plusieurs responsables marketing, la demande continue de progresser ces deux dernières années. « Bien que le contexte économique soit difficile depuis 2008, nous constatons une évolution très favorable du nombre de participants à nos formations », révèle Cathy Dufour, directrice marketing chez Comundi.
Du côté du secteur privé à but non lucratif, le constat est moins heureux. « Il poursuit un déclin amorcé depuis de nombreuses années », conclut la DARES. En 1999, il représentait 38% des prestataires de formation continue. En 2008, sa part tombe à 26%. « Il constitue néanmoins le tiers du marché en CA et en nombre de stagiaires », nuance la DARES. Un recul qui pourrait s’expliquer par la spécificité de ses formations, tandis que les entreprises se tournent davantage vers des disciplines générales ou comportementales. « Les associations restent fortes dans des secteurs d’activité très pointus », avance Carole Dumortier, responsable marketing de l’offre chez CSP formation.
Privé Vs Public : des terrains de chasse distincts
Selon la DARES, le nombre d’organismes publics et parapublics recule de 4 % et représente un peu moins de 6 % des prestataires. Là encore, ce sont le contenu et la nature des formations qui fait se creuser l’écart Privé/Public. Pour Carole Dumortier, « il n’y a pas réellement de concurrence forte, chaque acteur ayant sa spécificité. Les acteurs publics sont plus orientés sur les formations d’insertion professionnelle, les formations techniques, longues et souvent diplômantes », donc moins accessibles et recherchées par les entreprises. « Ces organismes sont certes minoritaires », selon les termes de la DARES, mais ils trouvent leur public, puisqu’ils forment un stagiaire sur 5.
La faible part du public, par rapport au privé, est liée au cloisonnement intrinsèque de ces deux secteurs. Les administrations publiques favorisent la formation en interne et, lorsqu’elles décident d’externaliser, « elles font très largement appel aux établissements publics », constate la DARES.
Les organismes publics de formation continue tentent de séduire les entreprises, mais « ils ne sont pas prêts », affirme Carole Dumortier, qui invoque « leur manque de réactivité et d’engagement sur les résultats ».
Les formateurs indépendants : rivaux ou partenaires ?
S’ils ne représentent que 32% des prestataires (en 2008), leur part reste plus importante que celle du secteur public. En nombre, « les formateurs individuels connaissent la plus forte hausse » (6,4%), remarque la DARES. Constituent-ils des concurrents dangereux pour les organismes de formation ? Non, répondent en chœur les deux responsables marketing, invoquant le partenariat plus que la rivalité.
Chez CSP, on considère qu’il est difficile pour un indépendant d’être à la hauteur « des exigences croissantes des entreprises » et de répondre à la multiplicité des modes de formation recherchés (e-learning, classes virtuelles, serious games…). En proie aux imprévus – « disparition de sa société, maladie, surcharge temporaire, compétences moindres sur une partie des prestations » –, il n’apporterait pas les garanties suffisantes à une entreprise pour des projets de formation sur le long terme.
Chez Comundi, l’indépendant n’est pas un concurrent mais un associé potentiel. « Beaucoup d’entre eux sont nos partenaires ; en travaillant avec nous, ils s’appuient sur notre savoir-faire pédagogique, logistique et relation clients. » Une fois le besoin établi et la structure de la formation bâtie, Comundi pioche dans le vivier des indépendants pour trouver « le formateur le plus pertinent », qu’il soit « consultant avec une forte expérience de terrain ou opérationnel en poste ». CSP fait également appel à des indépendants, « recrutés, formés et suivis avec autant d’attention que nos formateurs salariés », précise Carole Dumortier. Cet engagement de leur part à se former auprès de l’organisme constitue d’ailleurs un engagement de leur part sine qua non à la poursuite de leur collaboration.
Typhanie Bouju
[1] « Les prestataires de formation continue en 2008 », parue en août 2010.