La start-up investie sur le créneau de la livraison de repas sains, rue dans les cuisines en proposant des horaires libres et des vacances illimitées à ses collaborateurs. Entretien avec François Raynaud de Fitte, co-fondateur de PopChef.
Pourquoi avoir opté pour ce dispositif de vacances illimitées ?
François Raynaud de Fitte : nous avons lancé PopChef en 2015, nous sommes aujourd’hui une équipe de 25 personnes. Depuis toujours, nous pensons que la vision traditionnelle du patron est dépassée. Chez PopChef, nous prônons deux valeurs essentielles : la liberté et la responsabilité. Nous souhaitons recruter les meilleurs profils, s’épanouissant dans un environnement libre et responsabilisant. Nous fonctionnons 100 % à la confiance, et ça marche.
Quel est le principe de cette liberté ?
Avec les vacances illimitées, chacun est libre de s’organiser comme il entend, du moment qu’il agit dans l’intérêt de PopChef. Nous préférons responsabiliser nos équipes sur leurs objectifs plutôt que sur les horaires. Faire une sieste quand on est fatigué c’est dans l’intérêt de l’entreprise, de la même manière que ça l’est de partir en vacances régulièrement. À l’inverse, partir en vacances alors que ses objectifs ne sont pas réalisés et sans avoir assuré une continuité pendant son départ, cela nuirait à PopChef. C’est cela le principe de responsabilité : la capacité d’arbitrer entre les activités que l’on souhaite faire et l’intérêt de l’entreprise.
Concrètement, comment les salariés préviennent-ils de leur CP ?
Encore une fois, nous limitons les processus au maximum en reposant sur un principe de confiance. Il n’y a donc pas de délai imparti. Ils font eux-mêmes une demande de congés sur notre outil RH qui s’appelle Payfit, que nous validons systématiquement.
Comment cela fonctionne-t-il ?
C’est très simple : chaque personne a la possibilité de partir en vacances quand il le veut, sans justification particulière, et sans répercussion sur son salaire. Si vous souhaitez partir prendre l’air, faire un long weekend, partir même plusieurs semaines, vous le pouvez. Nous sommes convaincus qu’il faut laisser aux meilleurs talents la liberté de partir en vacances quand ils le souhaitent, et d’organiser leur journée comme ils l’entendent. C’est le principe de la confiance réciproque : nos salariés nous font confiance pour piloter l’entreprise avec succès, nous attendons également d’eux qu’ils soient suffisamment bons et responsables pour s’organiser sans notre permission et notre accord permanent.
Doivent-ils indiquer leur temps d’absence avant de partir ? A qui ?
Afin de préserver une culture d’entreprise saine, nous demandons à nos salariés d’être transparents avec le reste de l’équipe sur leurs congés et d’indiquer leur temps d’absence sur notre outil RH.
En moyenne, combien de jours de congés sont posés par salarié ? C’est plus, c’est moins que le nombre légal de jours ?
Nous n’avons pas assez de recul aujourd’hui pour donner des chiffres précis. En revanche, la tendance semble montrer que nos collaborateurs hésitent moins à prendre des weekends prolongés et des journées de télétravail, qui sont excellentes pour le repos et la productivité. Je ne crois au risque d’un abus de confiance, ni même au risque qu’un salarié se prive de vacances par peur d’être jugé par son management. Il est très clair que ce système responsabilise énormément le salarié, qui se retrouve seul maitre de son emploi du temps et de la réalisation ou non de ses objectifs. Ce sentiment de responsabilité vient tempérer la liberté d’horaire chez PopChef, et un juste équilibre se fait naturellement. En un mot, nous avons souhaité faire de la confiance un outil de management.
Vous est-il arrivé de refuser un départ ?
Jamais.
Ce système de vacances illimitées vaut-il pour tous les collaborateurs de l’entreprise, y compris le top management ?
Briac (ndlr : Lescure) et moi avions constaté que nous prenions des pauses dès qu’on en ressentait le besoin, sans particulièrement prendre le temps de compter les jours. Nous n’avons pas souhaité imposer une règle différente à nos collaborateurs, alors même que nous prônions un management “flat” avec très peu de hiérarchie. Chez PopChef, toute l’équipe est logée à la même enseigne.
Sont-ils entièrement déconnectés durant leurs vacances ou doivent-ils rester joignables ?
Une fois de plus, pas de règle et pas de processus particulier pour encadrer les vacances. Certains (comme moi), préfèrent une coupure nette pour reprendre effacement des forces. D’autres, plus anxiogènes, préfèrent prendre des nouvelles de l’entreprise pendant leurs congés. Quoi qu’il en soit, nous ne reprocherons jamais à un salarié d’avoir coupé son téléphone pendant son temps off !
En quoi est-ce un outil pour attirer les talents ? Pour fidéliser les collaborateurs ?
Nous avons des retours très positifs de nos équipes. On sent une plus grande implication de l’équipe au quotidien. Tout le monde a compris que la culture des horaires, très marquée dans les grandes entreprises n’a aucun sens. Si une personne veut aller nager à la piscine en plein milieu de l’après-midi, on ne la regarde pas bizarrement. Au contraire, elle y est fortement encouragée ! De la même manière, on préfère avoir dans les bureaux des gens en forme, souriants et motivés qui partent se ressourcer en vacances régulièrement, plutôt qu’une équipe fatiguée et démoralisée qui n’ose pas prendre de congés sous la pression de ses managers… Cela vient de la culture d’entreprise de manière générale. Par exemple, nous sommes très transparents sur les chiffres. Tout le monde est au courant du chiffre d’affaires quotidien, de la trésorerie, des levées de fonds… Ça semble évident, pourtant dans la majorité des start-ups, les salariés n’ont aucune idée chiffrée de la santé de l’entreprise.
Recueillis par Sylvie Laidet