« 3 défauts pour un entretien de recrutement : bavarde – obstinée – perfectionniste ou est-ce qu’on peut se permettre quelque chose d’original? »
Voici mot pour mot le mail que j’ai reçu d’une amie la semaine dernière. Et comme je passe une bonne partie de mon temps à accompagner des DRH, RRH, Chargé(e) de recrutement, Consultant(s)… j’ai tenu à leur poser directement la question. Leurs réponses m’ont rassuré, nous nous sommes amusés du sujet lors de déjeuners, et finalement je trouvais intéressant de vous en faire part :
« J’ai arrêté de poser cette question après y avoir été confrontée en tant que candidate. C’est certainement le meilleur moyen de prendre du recul sur notre job. » #empathie
« Il m’arrive de poser cette question, et un jour un candidat m’a répondu : et les vôtres? » #qui-est-qui? #malaise
« Je la pose quand les candidats ne sont pas bavards et que je suis à court de questions. » #planB
« Ca existe encore ça? » #2014
Pour vous résumer nos échanges en substance, tout le monde s’accordait à dire que cette question n’apportait rien car les réponses étaient totalement dénuées de spontanéité. Pour autant si la pratique est toujours répandue, comme de nombreux autres clichés dans les entretiens de recrutement, c’est qu’il est difficile pour les recruteurs de se montrer originaux sans passer pour marginaux, respecter l’image pro de l’entreprise sans tomber dans le conventionnel. Nos échanges ont donc naturellement convergé sur ce que chacun met en place pour se renouveler dans sa pratique :
« Alors pour ma part je leur demande de citer 3 qualités et 3 défauts. Et quand les candidats commencent à se lancer dans une présentation mi-fière (parce que contents de l’avoir préparé) et en même temps mi-tigée (car on ne sait jamais avec ces questions pièges), je les arrête tout de suite en leur disant que je jouais sur les clichés. C’est ma question pour mettre à l’aise, je sens que l’entretien prend une tournure plus détendue ensuite. Autant se servir de ça à notre avantage… »
« Je leur pose un maximum de questions sur eux. Pendant une période je leur demandais même combien de fois ils faisaient l’amour par semaine. Ce n’est pas sur cette réponse que je prenais ma décision, qu’on soit bien d’accord, mais c’était pour faire tomber les barrières. Par ailleurs les justifications étaient assez intéressantes… mais j’ai arrêté pour des questions légales. »
« J’ai tourné la question différemment pour arriver au même résultat. Je commence toujours par les qualités pour valoriser le candidat, en lui demandant ce qu’il apporte à un groupe de travail, sur quoi les autres lui demandent des conseils ou du soutien. Ensuite je renverse naturellement la situation : sur quels aspects est-il content de pouvoir s’appuyer sur les autres? Je suis assez contente du résultat. »
« Moi dans le même genre je leur demande ce qu’ils font mieux que 99% des gens. J’ai remarqué que ce qui peut bloquer les candidats c’est le sentiment de se montrer supérieurs aux autres, mais en leur expliquant simplement que c’est ce qui les démarque, ils apprécient. Ca n’empêche pas quelques réponses farfelues comme cette candidate qui m’avait répondu « les cookies », et malheureusement ce n’était pour un poste en pâtisserie. »
Maintenant laissez moi vous faire part d’une approche à la fois sérieuse et originale, qui permet de recueillir une information incroyablement riche sur vos candidats. Je constate chez tous les recruteurs le sentiment d’avoir touché quelque chose lorsqu’ils arrivent à faire parler les candidats sur eux-mêmes, sur QUI ils sont. Et c’est loin d’être évident. Une des approches les plus courantes à ce sujet est de les questionner sur leurs hobbies. Certes. Mais que retirez-vous vraiment de cette discussion sinon quelques qualités comme le sens de l’équipe ou le dépassement de soi? Un moyen de maximiser cette partie de l’entretien est de demander à vos candidats de vous apprendre leurs hobbies!
Voici l’idée : partez de ce qui passionne le candidat, et dites lui qu’il a 5 minutes (chronométrées!) pour vous apprendre à être aussi doué(e) que lui à ce sujet. Spécifiez-lui qu’il peut prendre le temps qu’il veut pour se préparer, qu’il a le droit de vous poser des questions, et utiliser l’espace et les objets du bureau s’il le faut. Soyez vigilant aux éléments suivants…
# Sa préparation : validez qu’il ne se précipite pas, qu’il a structuré son approche, mais qu’il sait aussi passer à l’action.
# Son approche : se met-il à votre niveau? Démontre-t-il un intérêt pour comprendre d’où vous partez, quels sont vos acquis sur le sujet? Vous implique-t-il dans sa démonstration? Les meilleurs candidats arrivent à faire du lien entre vous et l’objectif, par exemple en créant des connexions entre votre passe-temps et le leur.
# Son discours : est-il pédagogue? Valide-t-il que vous comprenez où il veut aller?
# Sa gestion du temps : essaie-t-il d’optimiser le temps qu’il a pour vous apprendre un maximum?
# Sa conclusion : quel bilan fait-il de l’exercice? Est-il satisfait? Qu’aurait-il fait différemment?
Il ne vous reste plus qu’à expérimenter la technique. Je vous invite sincèrement à poster vos résultats en commentaires.
Simon BARON
Psychologue du travail diplômé de l’Université de Nantes