La communication interne ne peut pas tout. Sommée de répondre à un sentiment croissant de mal-être dans un environnement professionnel devenu instable, voire précarisé, celle-ci peine à adresser la perte de signification perçue par les salariés dans le cadre de leur activité professionnelle. C’est d’ailleurs une des conclusions du rapport sur la mesure des performances économiques et du progrès social commandé par le gouvernement aux professeurs Joseph Stiglitz, Amartya Sen et Jean-Paul Fitoussi, qui en appellent notamment à une prise en compte des facteurs subjectifs de dialogue social comme une composante fondamentale pour mesurer le bien-être des citoyens.
Mais de quoi parle-t-on, au juste ? Dans sa vie privée, chaque individu trône au centre de son propre rayonnement, qu’il anime et agrémente au gré de ses envies et de ses choix. Il y est d’ailleurs incité par la société de consommation, qui flatte ce nombrilisme à des fins commerciales. Dans sa vie professionnelle, en revanche, celui-ci devient exposé à un arbitraire parfois violent. Privé de son libre-arbitre et balloté par des décisions qui lui échappent dans un cadre de plus en plus déshumanisé, il devient dés lors un simple rouage excentré de sa propre sphère. De centre de l’univers, il devient zombie. Ce décalage explique pour une large part ce mal-être latent dans l’entreprise.
C’est dans ce contexte que la radio d’entreprise a un rôle à jouer pour les directions de la communication interne. En « horizontalisant » le dialogue là où l’entreprise repose sur une organisation verticale en silo, celle-ci permet de rétablir cette proximité perdue. Le message de la direction ou de l’encadrement étant construit en réaction à une interrogation venue de bas en haut, et non plus sur un seul mode (con)descendant. En inversant le rapport hiérarchique, il recentre l’organisation autour de l’individu, et non plus l’inverse. Média de la parole, il restaure une sociabilité diluée par l’hétérogénéité des populations au sein d’une même organisation. Non pas en manipulant le salarié (ce qui renforcerait ce sentiment de dépossession de soi), mais en lui permettant de s’exprimer sans ménagement, puis en lui répondant honnêtement, sans tabou, à l’opposé du discours officiel.
Pour ces raisons, les radios d’entreprises trouvent leur utilité dans les périodes de crise sociale, mais pas seulement. En instaurant les conditions d’un dialogue régulier, incarné et décomplexé, elles apportent les conditions d’un dialogue social apaisé dans une logique préventive. Et complètent les carences de l’écrit et de la vidéo pour répondre à cet enjeu vital pour les entreprises.
Yves Bongarçon,
Directeur associé responsable du pôle éditorial
Moustic « The Audio Agency »