La parité hommes/femmes dans les entreprises françaises est devenue un enjeu majeur pour les recruteurs. Et si ceux-ci tentent de féminiser pas à pas leurs effectifs, il reste des fonctions où les femmes – pourtant reconnues pour leurs performances – sont encore très peu nombreuses. Elles ne représentent ainsi que 17 % des ingénieurs en poste. Un état des lieux qui suscite réflexion et pousse services RH en entreprises, institutions et associations à mener des actions spécifiques. C’est le cas de Femmes Ingénieurs et Orange qui conjointement travaillent sur cette question via, entre autres, l’opération Shadowing.
En France, le nombre de femmes ingénieurs a rapidement évolué au cours des dernières décennies, elle a connu un boum dans les années 80/90 mais c’est un fait : depuis sept ans le pourcentage de filles diplômées d’écoles d'ingénieurs stagne à 27 %.
Dans certains secteurs d’activités comme l’électronique ou la mécanique, celui-ci atteint tout juste les 10 %… alors qu’il est pourtant de 50 % en 1ère S. La profession d’ingénieur est d’ailleurs celle dans laquelle la proportion de femmes reste la plus faible par rapport aux autres domaines scientifiques (on compte par exemple 53,4 % de femmes actives dans les sciences de la vie*).
Pourquoi recruter des femmes ?
Difficile donc dans ce contexte de retrouver des femmes ingénieurs en entreprise ! Et pourtant, les enjeux sont énormes. C’est du moins l’avis de Marie-Hélène Therre, présidente de l’association Femmes Ingénieurs.
Selon elle, la problématique du recrutement des femmes dépend bien sûr d’une volonté de certaines entreprises à répondre aux exigences d’égalité hommes/femmes, mais pas seulement.
« Aujourd’hui, explique la présidente, de nombreuses entreprises se mobilisent pour le recrutement de femmes ingénieurs parce qu’elles doivent faire face au départ des baby-boomers.
Les femmes sont reconnues pour leur expertise et surtout elles permettent un rapprochement du marché et fluidifient les pratiques de management. » Sur un marché où 50 % des clients sont des clientes, les entreprises ont en effet tout à gagner à promouvoir la diversité hommes/femmes dans leur recrutement et à l’intégrer comme vecteur de créativité, d’efficacité et de bonne compréhension des problématiques.
Toute la question aujourd’hui est donc d’attirer les femmes dans ces filières scientifiques « et surtout, insiste Marie-Hélène Therre, de les garder, de les fidéliser ». Charge alors aux pouvoirs publics, aux écoles et aux entreprises de se mobiliser pour casser les stéréotypes qui conduisent les filles à « s’autocensurer » en boudant, après le bac, certaines filières, ou à changer de cap à un moment de leur carrière.
A côté de l’attractivité des métiers, il faut donc prendre en compte les perspectives offertes par les entreprises et la problématique de la construction des carrières.
Orange et Femmes Ingénieurs pour une meilleure représentativité féminine
C’est sur cette problématique que le groupe Orange, en lien justement avec Femmes Ingénieurs, a lancé depuis 2009 « Shadowing », une opération qui vient agir sur deux leviers que sont la promotion des carrières scientifiques auprès des lycéennes et la valorisation des femmes ingénieurs dans leur fonction.
« Le shadowing; explique Isabelle Schaefer, directrice de la stratégie égalité professionnelle à la direction de la diversité, est une opération par laquelle des jeunes filles en phase d’orientation viennent dans l’entreprise pendant une journée. Elle y sont invitées à découvrir les réalités d’un ingénieur et les différentes facettes que revêt ce métier ».
Concrètement, une jeune fille, souvent en classe de première ou de terminale, est accueillie par une femme. Elle devient, en quelque sorte, sur la base du volontariat, sa « marraine » et va l’intégrer véritablement dans son quotidien, son travail avec les autres, la diversité de ses projets et même les moments plus conviviaux comme ceux de la pause déjeuner !
Pour casser les stéréotypes !
Bien loin des stéréotypes qu’elles ont régulièrement entendus sur ces métiers, les jeunes filles sont souvent surprises, commente Isabelle Schaefer : « Elles découvrent des facettes dont elles n’avaient pas du tout conscience. Elles rencontrent des professionnelles expertes dans leur domaine qui travaillent beaucoup en équipe avec une forte dimension internationale ». Pour la directrice, l’opération est aussi un excellent moyen de valoriser les équipes en interne.
« C’est surtout l’occasion pour elles, précise-t-ton chez Orange, d’expliquer ce qu’elles font, de présenter leur parcours. C’est d’ailleurs une opération qui a beaucoup de succès avec plus d’une centaine d’ingénieures qui se mobilisent chaque année. C’est du donnant-donnant ! »
Et Isabelle Schaefer de préciser que l’action est assez simple à mettre en place et qu’elle peut être facilement dupliquée un peu partout en France mais également à l’étranger. Des opérations ont ainsi déjà été menées dans le groupe aux États-Unis et en Égypte et de nouvelles expériences devraient voir le jour ces prochains mois.
Audrey CAUDRON VAILLANT
*. Source: «She Report», Eurostat Education Statistics – DG Research, 2006. Cette estimation comprend les femmes actives dans le domaine des Sciences de la Vie, hors ingénieurs.