Une étude publiée par l’Institut d’études économiques Xerfi en mai 2012 montre que, situation de crise oblige, les entreprises et leurs services RH ont eu tendance ces dernières années à ralentir leurs investissements en formations linguistiques au profit d’autres domaines plus directement opérationnels. Pourtant, les besoins restent importants et les organismes de formation diversifient leurs offres, associant à leurs outils pédagogiques traditionnels, toujours plébiscités, de nouvelles pratiques innovantes comme la visioformation et le blended learning.
Estimé à plus de 400 millions d’euros, le marché de l’enseignement des langues, pénalisé par la crise depuis 2009, devrait retrouver quelques couleurs cette année. Selon les estimations des experts Xerfi, il progresserait alors de 0,5 % en valeur avant de rebondir plus franchement en 2013 de l’ordre de + 3 %. Depuis deux ans, les entreprises se concentrent sur d’autres domaines comme le management, le marketing ou encore la communication. « Ces dernières années, explique Faïza Bolongaro, chargée d’études chez Xerfi, pour des questions purement conjoncturelles, les entreprises ont un peu délaissé les formations en langues au profit de secteurs immédiatement opérationnels. »
Des besoins en langues toujours croissants
Pourtant, les besoins sont croissants en entreprises et l’apprentissage des langues occupe aujourd’hui une place à part dans la construction des plans de formations. Avec la poursuite de la mondialisation de l’économie, l’anglais (90 % des heures de formations dispensées) est devenu incontournable au sein des entreprises, jusqu’à conditionner l’accès à certains postes, notamment dans les multinationales. « Diverses études sur les compétences en anglais démontrent que si le niveau général des salariés français est globalement correct, il reste beaucoup à faire sur l’anglais appliqué avec d’énormes besoins dans les domaines techniques », explique Faïza Bolongaro. Et de préciser que si les jeunes diplômés sortent aujourd’hui des écoles avec un meilleur niveau de langues que leurs prédécesseurs, boostés par de nombreux voyages et stages à l’étranger, « les entreprises doivent en revanche former leurs salariés de plus de trente ans qui ont déjà perdu les apprentissages scolaires et pour lesquels le vocabulaire technique n’est pas acquis ». Et ceci quels que soient les secteurs d’activité, en dehors du tourisme bien sûr. Enfin, le recours au DIF, sous-exploité en France, ouvre également une voie pour développer le marché de l’enseignement en langues et devrait favoriser des démarches individuelles de formation.
Les apprentissages par téléphone et en face à face toujours plébiscités
Le marché de l’enseignement des langues est aujourd’hui peu structuré. Il se compose d’une multitude d’opérateurs, intervenant à l’échelle locale ou nationale, appartenant à la sphère privée lucrative, au domaine public, voire associatif. On citera les généralistes de la formation (comme Demos ou Cegos) qui ont développé des cours de langues afin de proposer une offre globale de formation à leurs clients grands comptes ; les écoles de langues (Wall Street Institute, Berlitz), essentiellement spécialisées sur l’enseignement de l’anglais avec leurs offres sur mesure ; les spécialistes de la formation par téléphone (Telelangue, GoFluent) ou les acteurs de l’e-learning (Babbel) qui proposent uniquement des solutions distancielles. Dans ce panorama, il semblerait que les entreprises restent fidèles aux apprentissages traditionnels comme le téléphone ou les cours en face à face, qui ont fait leurs preuves et restent largement plébiscités (les cours en face à face représentent encore aujourd’hui 80 % des prestations).
Le nouveau potentiel de la visioformation et du blended learning
Si Faïza Bolongaro se montre sceptique quant à la pertinence des méthodes purement distancielles qui « supposent généralement un engagement du salarié en dehors de son temps de travail et affichent des résultats décevants en raison d’un taux d’abandon de l’ordre de 70 % », elle croit néanmoins au potentiel de la visioformation et du blended learning qui se développent un peu partout aujourd’hui. « La visioformation, explique la chargée d’études, est une excellente alternative aux cours en face à face. Alors qu’une grande partie des enseignements se déroule en région parisienne, cette solution semble correspondre aux besoins des entreprises situées en province et leur évite des déplacements souvent coûteux. L’apprenant est certes à distance mais il reste en contact direct avec son enseignant ». Dans ce contexte, le blended learning, cette offre mixte entre e-learning et présentiel, est également une solution intéressante. Elle s’inscrit en effet dans l’évolution des supports de formation avec le développement des usages de smartphones, tablettes ou autres outils technologiques, et constitue par conséquent une voie d’avenir pour la profession.
Audrey Caudron-Vaillant