Rémy Delabays est plusieurs fois intervenu dans nos pages, nous éclairant sur ses projets en tant que DRH de Lisi Aerospace. Aujourd’hui, c’est de l’ensemble de son parcours dont il nous parle. Un parcours des plus atypiques puisqu’il début dans le domaine de l’horticulture. Mais c’est assez rapidement que son intérêt pour le social et l’Homme, « avec un grand H », comme il le dit lui-même, le fera bifurquer vers les RH. Une profession souvent stressante, mais qui le passionne autant – si ce n’est plus – qu’à ses débuts.
« Le DRH est toujours entre le marteau et l’enclume. »
« Être DRH est un métier stressant parce qu’on est toujours entre le marteau et l’enclume, entre la direction, les actionnaires d’un côté, et les syndicats, le personnel de l’autre ; c’est un jeu de soudure périlleux car l’économique et le social ne font pas toujours bon ménage », explique Rémy Delabays. Puis il y a le contexte professionnel, qui n’est par pour faciliter la tâche des DRH : le droit du travail qui se complexifie, les nouvelles technologies qui envahissent l’entreprise, une jeune génération qui réinvente les modes de communication, travaille autrement, IPad en main et session Facebook toujours ouverte. « Le DRH est pris dans ce tourbillon, poursuit-il. Pris entre des gens qui ont de la bouteille et la jeune génération ; il faut savoir faire cohabiter les deux ». Selon lui, le DRH est un médiateur mais il a aussi pour rôle de tempérer. « Il essaie de mettre de l’huile dans les rouages », illustre Rémy Delabays. En cela, sa maîtrise de psychologie du travail et clinique, qu’il a obtenue avant son DESS de GRH, lui est bien utile. Aujourd’hui encore il se replonge dans des ouvrages de psychologie : comment motiver, gérer des personnes, comprendre leur fonctionnement psychologique.
« Je ne suis pas un expert d’une fonction RH en particulier »
« Je suis un DRH généraliste. Je me considère comme leader d’une équipe. Mon rôle est d’avoir une vision en termes de politiques RH et de vérifier que nous nous inscrivons vraiment comme un business partner. Je coordonne les projets de l’équipe, je propulse les actions. » Ainsi décrit-il sa mission chez Lisi Aerospace, insistant sur le fait que le DRH doit être capable d’innover, d’écouter les idées du personnel et de les vendre auprès de la direction. Mais Lisi Aerospace n’a pas été sa première « maison ». Rémy Delabays s’est construit, en tant que DRH, au fil de nombreuses expériences complémentaires, au sein d’entreprises françaises, familiales, internationales et dans des secteurs très différents.
« J’ai beaucoup appris dans l’automobile, notamment l’importance de centrer la fonction sur le client et la performance. La fonction RH doit produire de la Valeur Ajoutée », précise-t-il. Chacun de ses passages dans une entreprise aura été l’occasion pour lui de découvrir une nouvelle facette de la fonction RH. Adjoint au chef du personnel dans une société Alsacienne de fabrication de machines textile, il s’occupait du recrutement et de la gestion du personnel. Chez Emerson Electric, une entreprise américaine, il était Responsable Emploi Formation. « J’y ai fait mes premiers pas dans la pratique du droit du travail et la gestion de la paie, avec la mise en place d’un SIRH », se souvient-il. Puis, chez Plastic Omnium, il devient Responsable RH. C’est là qu’il apprend la négociation – « j’y ai négocié les 35h » – et vit ses premières grèves. Au sein de Bouygues Construction, en tant que Directeur du Développement RH, il prend en charge la gestion des talents et des compétences de la filiale ETDE. DRH chez Rexam, puis chez Lisi Aerospace, où il créé la fonction RH Corporate, il peut en effet désormais se dire généraliste et DRH complet.
« Carpe Diem »
Parce que son métier n’est pas de tout repos, il porte cette maxime « Carpe Diem » comme un principe de vie. « Au-delà des RH, il faut savoir se garder du temps pour soi, pour rester objectif. J’apprécie les moments de convivialité avec des amis autour d’une bonne bouteille. La musique me permet d’évacuer mon stress. En concert ou pendant les répétitions, on vit des moments inoubliables », révèle Rémy Delabays. S’il joue aujourd’hui dans le groupe Kiprocko pour le plaisir, il a hésité un moment entre une carrière de musicien et une autre dans le social. « A l’époque du Vinyle, partage-t-il, j’avais un groupe et nous avions même sorti un disque ! ». Finalement, « la raison l’a emporté sur le cœur », poursuit-il. « J’étais très impliqué dans des associations humanitaires. J’ai toujours eu un attrait pour l’Homme, avec un grand H », explique-t-il. Aujourd’hui âgé de 45 ans, il ne regrette en rien ce choix. « J’ai toujours autant la “patate” pour aller travailler, plaisante-t-il. Le jour où je ne l’aurai plus, je ferai autre chose, je trouverai le courage de me reconvertir ».
« J’admire les gens qui à 45 ans sont capables de changer de voie », dit-il. Lui a déjà vécu sa propre reconversion. Le DRH d’aujourd’hui avait commencé par étudier l’horticulture, avant de bifurquer vers la psychologie. « Il faut être capable de remettre ses certitudes en questions. A 45 ans, on ne peut pas dire : je connais tout, j’ai tout vu. On n’a jamais fini d’apprendre. C’est pourquoi il est important de sortir, d’aller au cinéma, de lire. Et pas seulement des ouvrages RH, mais aussi de philosophie, de spiritualité ». Les références du DRH sont très variées. Il cite notamment Steve Jobs : « Il incitait les jeunes à créer, à innover. Cela vaut aussi dans la fonction RH ». Il garde en tête également une philosophie que lui a enseignée Jean-François Bonassi, son premier mentor : « pour réussir, il faut s’entourer des meilleurs experts, des meilleurs talents. Il m’a donné le goût de l’excellence ».
Dans les couloirs de Lisi Aerospace, Rémy Delabays guette les signes de bien-être de ses collaborateurs. « Un de mes anciens patrons m’avait dit qu’il existait une façon très simple de vérifier le climat social d’une entreprise : si les gens sifflent ou chantonnent dans les couloirs, c’est qu’ils sont heureux de venir travailler ». Des gens qui sifflotent, le DRH en entend ; et lui-même entonne probablement l’un des airs de son prochain concert lorsqu’il est en route pour son bureau.
Typhanie BOUJU