L’entretien annuel, cet instant suspendu entre bilan et projection, est rarement vécu comme un moment véritablement enrichissant par les salariés. Pour beaucoup, il ressemble à un exercice de style, un rituel poussiéreux qui manque de spontanéité et d’authenticité.
Faut-il pour autant tirer un trait sur ce rendez-vous ? Et si nous le replacions plutôt dans une dynamique de conversations continues ? En le considérant comme un échange parmi d’autres, plus réguliers, plus authentiques, qui permettraient d’ajuster le cap en permanence – tout en conservant un temps fort annuel pour prendre du recul, se projeter, et construire ensemble une vision d’avenir.
L’entretien annuel, un rituel désuet ?
« Une formalité de plus… », « Un moment stressant qui ne change rien… ». Qui n’a jamais entendu ces réflexions au détour d’un couloir ? Pour beaucoup, l’entretien annuel ressemble davantage à un passage obligé qu’à une réelle opportunité d’échange et de croissance. Il s’agit même d’un moment redouté pour 41% des salariés. (OpinionWay, 2022).
Que lui reproche-t-on ? D’être trop formel, engoncé dans des cadres rigides qui laissent peu de place à la spontanéité. Pour certains, c’est un exercice de bureaucratie pure, où l’essentiel du temps est passé à cocher des cases plutôt qu’à échanger véritablement. Et puis, il y a le stress. L’appréhension qui monte à l’approche de la date fatidique. L’entretien annuel devient synonyme de jugement, un moment où l’on se sent évalué, pesé, mesuré… Mais rarement encouragé. Tout cela crée une anxiété contre-productive, éloignant encore plus cet échange de son objectif premier : le développement.
On ne peut plus ignorer davantage l’inadéquation de cet entretien avec la réalité d’aujourd’hui. Alors que l’on évolue dans des milieux professionnels en perpétuelle mutation, où les enjeux et les priorités évoluent sans cesse, attendre un an pour faire le point semble aller à contre-courant.
Alors, faut-il « killer » l’entretien annuel ?
L’idée de se débarrasser de l’entretien annuel séduit de plus en plus, au profit de discussions plus régulières et moins formelles. 33% des salariés se déclarent en faveur de cette option (OpinionWay, 2022). Pourtant, malgré ses imperfections, cet outil d’une autre époque n’a pas dit son dernier mot.
Ce rendez-vous, s’il est bien pensé, reste un moment unique pour prendre du recul, évaluer les trajectoires, et fixer des objectifs à long terme. Il apporte une vision d’ensemble, un cadre structurant qui complète utilement les échanges plus informels. C’est aussi le moment de procéder à une évaluation des compétences, d’identifier les lacunes, de planifier les formations, et d’envisager les évolutions de carrière…
Bien sûr, les conversations continues sont essentielles, mais elles peuvent (et doivent) s’articuler autour d’un moment annuel de réflexion stratégique. Il s’agit donc moins de tuer l’entretien annuel que de le réinventer, de le moderniser pour en faire un véritable levier d’épanouissement et de performance, en phase avec les besoins actuels des collaborateurs et des organisations.
Repenser les rituels plutôt que les éliminer
Il ne doit plus être question de se parler « vraiment » une fois par an, mais de créer des rituels de dialogue tout au long de l’année. Il convient d’imaginer des échanges réguliers, sous des formats variés : des 1:1 personnalisés qui permettent d’aborder les préoccupations immédiates, des peer reviews pour bénéficier du regard bienveillant de ses pairs, ou encore des ateliers collectifs pour faire émerger des idées nouvelles et co-construire l’avenir.
En ritualisant ces moments d’échange, on transforme la relation managériale en un espace d’écoute et de co-création. Les discussions deviennent plus fluides, plus naturelles, et surtout, plus impactantes. Bref, on fait vivre un véritable dialogue continu, où chaque parole compte.
Le pouvoir des conversations
Les conversations sont essentielles pour éviter désengagement et départs surprises. La clé pour résoudre la majorité des problèmes réside dans la capacité à verbaliser les enjeux et à écouter activement. C’est par la parole que naît la compréhension, et par l’écoute que se construit la confiance.
Comme le dit si bien l’adage : « Quand les maux sont entendus, ils sont à moitié résolus. » Verbaliser un problème, c’est déjà amorcer sa résolution, car cela permet de le clarifier, de le rendre tangible, et de le partager avec ceux qui peuvent aider à le surmonter.
Mais, vous l’aurez compris, pour que ces conversations aient un réel impact, il faut savoir écouter autant que parler. Il s’agit non seulement d’entendre les mots, mais aussi de percevoir ce qui n’est pas dit, de comprendre les émotions et les préoccupations sous-jacentes. C’est cet effort d’écoute qui crée un climat de confiance, où chacun se sent libre d’exprimer ses idées, ses doutes, ses aspirations.
Quelques idées pour passer de l’idée à l’action
- Définissez un planning adapté à votre réalité opérationnelle : Notre recommandation ? Un temps pour l’entretien annuel et un autre pour l’entretien professionnel, jalonné par quelques « 1-1 prise de hauteur ». Ce calendrier devient alors le fil rouge d’une relation de travail fondée sur le dialogue continu et la co-construction.
- Clarifiez les objectifs des différents entretiens : Tous les entretiens ne poursuivent pas les mêmes objectifs. Il est crucial de distinguer clairement l’entretien annuel, axé sur l’évaluation des performances et la définition des objectifs futurs, de l’entretien professionnel, qui se concentre sur le développement des compétences et l’évolution de carrière. En précisant les attentes de chaque type d’entretien, vous permettez à chacun d’y trouver une vraie valeur ajoutée.
- Encouragez vos collaborateurs à faire un bilan de sens : Une introspection qui leur permet d’exprimer clairement leurs besoins et attentes. Ce moment de réflexion personnelle, qui a toute sa place dans l’entretien professionnel, est essentiel pour qu’ils puissent se reconnecter avec ce qui leur donne de l’élan dans leur travail.
- Former les managers à la « questiologie » : Cette discipline qui consiste à poser des bonnes questions, ouvertes, qui invitent à l’expression, à la réflexion, et qui dénouent les problèmes.
- Former les collaborateurs au feedback : Oui, donner et recevoir du feedback est une compétence à part entière, qui nécessite formation et pratique. En apprenant à formuler des retours constructifs, les collaborateurs deviennent des acteurs à part entière de l’amélioration continue. Et en étant formés à recevoir le feedback, ils gagnent en résilience et en capacité de progression.
À vous de jouer !
Prenez un moment pour réfléchir à vos pratiques. Comment vos entretiens pourraient-ils évoluer pour devenir plus pertinents et impactants ? Quels rituels pourriez-vous mettre en place pour nourrir des conversations régulières et constructives ?
Pour aller plus loin et découvrir comment transformer vos échanges, n’hésitez pas à télécharger le dernier livre blanc de somanyWays. Vous y découvrirez 5 modèles d’entretiens et des questions guides pour préparer et orienter vos conversations.