Petite start-up prometteuse en 2000, date de sa création, Legisway est devenue une PME d’une quarantaine de salariés en pleine croissance. Aujourd’hui, 60% des salariés détiennent plus d’un quart du capital de l’entreprise. Retour sur une politique d’actionnariat salarié volontariste.
Quand un client rencontre l’un des collaborateurs de Legisway, il a plus d’une chance sur deux d’être en face d’un actionnaire. Depuis 5 ans maintenant, l’éditeur de logiciels de pilotage de contrats a lancé une vaste campagne d’actionnariat salarié. Bilan : aujourd’hui 60% des salariés détiennent 26% du capital. Les 74% restant étant aux mains de Jérôme Teissier, le PDG de Legisway.
« Lorsqu’en 2011, les deux groupes d’investisseurs sont sortis de notre capital, j’ai réfléchi et décidé que l’entreprise serait désormais pilotée par le créateur, donc moi et ses salariés », se souvient-il. Pour autant, pas question de distribuer des actions gratuites. « Quelqu’un qui veut devenir actionnaire doit prendre un risque, ça doit représenter quelque chose pour lui. En payant ses actions, il s’engage », insiste-t-il.
Tous les salariés volontaires peuvent acquérir des actions, (quelle que soit leur ancienneté) au prix fixé une fois par an et dont la valeur résulte de la division du chiffre d’affaires par le nombre d’actionnaires. En 2011, le prix de l’action était de 29 euros. Aujourd’hui, il est grimpé à 48,50 euros.
Pour que cela fonctionne, très vite, dès le premier actionnaire salarié, un pacte d’actionnaires très synthétique est édicté. A l’intérieur, plusieurs règles s’imposent. « Le texte stipule que lorsque l’actionnaire majoritaire, donc moi, fait quelque chose, les autres actionnaires peuvent faire la même chose. Par exemple, si je décide de vendre, tous peuvent vendre au même prix que moi », illustre-t-il. En contrepartie, si une entreprise souhaite racheter 100% des actions, l’ensemble des actionnaires doit suivre le majoritaire. « Un salarié qui souhaiterait vendre ses actions à un tiers extérieur doit obtenir l’accord du conseil d’administration. Ca n’arrive jamais donc quand le cas se présente, je rachète les actions concernées », précise-t-il. En pratique, il vend autant d’actions que les salariés souhaitent mais n’entend pas lui détenir moins de 60% du capital.
Cette politique active d’actionnariat salarié change le rapport au travail des collaborateurs. « Ils ont une vision différente de l’entreprise car ils participent à la définition de la stratégie. Lors des assemblées générales, ils votent les délibérations, ils peuvent poser des questions, ils ont accès à toutes les informations. Ils découvrent l’entreprise d’un point de vue juridique et financier. Ils sont capables de lire un bilan. Une entreprise est contrainte par des charges incompressibles, par le marché, par la concurrence… bref, qu’un dirigeant a souvent peu de marge de manœuvre. L’actionnariat salarié créé une culture économique et une certaine forme d’intelligence collective », argumente-t-il. En bref, qu’une dépense, c’est du dividende en moins.
En 5 ans, Legisway a distribué près d’un million d’euros de dividendes mais n’utilisent pas réellement ce dispositif comme outil de rémunération. « La distribution des dividendes est intéressante mais déconnectée de la rémunération variable et de l’octroi des primes », ajoute-t-il. Et heureusement, car 40% des salariés ne sont pas actionnaires. « Il n’y a pas d’ostracisme entre les actionnaires et les non actionnaires car certains ne peuvent pas le devenir, car à ce moment de leur vie, leurs priorités sont ailleurs. La seule différence est que certains votent en assemblée générale, les autres non », explique-t-il. Toutefois, cette politique d’actionnariat reste « challengante » car tous les salariés peuvent s’ils le souhaitent devenir actionnaires.
Sylvie Laidet