Le sujet du harcèlement sexuel au travail revient régulièrement sur la table, au gré des scandales, des nouveaux programmes du gouvernement et de l’actualité. Néanmoins, il semblerait que les débats auxquels nous sommes actuellement confrontés marquent, de par leur ampleur, une nouvelle donne par rapport au problème de la violence faites aux femmes. La mise en cause du producteur Harvey Weinstein et la campagne virale #balancetonporc a fait naître une vague de dénonciations à tout-va. Et ce n’est pas fini !
Mais lorsqu’on y réfléchit bien, le harcèlement sexuel au travail n’est pas un problème nouveau. Nous sommes en droit de nous demander « qu’est-ce qui a changé ? ». Est-ce le nombre d’actes de harcèlement qui a augmenté ou notre attitude par rapport à des comportements jugés indécents de la part des hommes envers les femmes ? Ou serait-ce les femmes qui, au final, exagèrent quant à l’interprétation du harcèlement sexuel ? Il est temps de mettre un peu d’ordre.
Harcèlement sexuel au travail : une étude qui en dit long
En 1981, le très sérieux Harvard Business Review avait été sollicité par le magazine Rebook pour conduire une étude sur le problème du harcèlement sexuel au travail. Les questions auxquelles le magazine souhaitait répondre étaient : Quelle est la gravité du problème ? Le harcèlement sexuel est-il omniprésent dans le monde de l’entreprise ? Dans quelle mesure est-il possible pour la direction de repérer et de l’éviter ? Plus de 7000 personnes furent interrogées et les réponses s’avérèrent plutôt étonnantes.
D’abord, les hommes sont bien moins nombreux à penser que le harcèlement sexuel sur le lieu de travail est un véritable problème. 66% d’entre eux pensaient d’ailleurs que le problème était « largement exagéré », contre 32% des femmes. Néanmoins, l’étude a mis en évidence que le problème de harcèlement sexuel au travail était bel et bien une réalité et pas seulement un fantasme exagéré à outrance par des femmes paranoïaques et des journalistes à sensation.
Deux sexes différents, deux attitudes opposées
L’étude du HBR a également mis en évidence qu’il existe des différences entre les hommes et les femmes par rapport à la manière dont le harcèlement sexuel devrait être traité. Les réponses ont montré que les femmes étaient plus favorables à voir leur harceleur recevoir un avertissement ou être licencié. Les hommes, quant à eux, sont nombreux à penser que les femmes devraient être en mesure de surmonter les avances sexuelles avec tact. En d’autres mots : c’est leur problème. La réponse de certaines femmes est plutôt surprenante. L’une d’entre elles, une femme cadre de 43 ans a répondu : « ces prétendues femmes libérés sont probablement celles qui causent tout ce désordre… ce serait mieux pour tout le monde si les femmes commençaient par agir comme des individus normaux ».
En 35 ans, qu’est-ce qui a changé ?
En 35 ans, si les techniques de harcèlement sexuel sont restées plus ou moins les mêmes, les entreprises sont bien plus nombreuses à avoir mis en place des politiques pour lutter contre le harcèlement sexuel et nombre d’entre elles proposent une formation permettant de le reconnaître et de le gérer au mieux. Néanmoins, même si l’existence du harcèlement sexuel a été dévoilée au grand jour et se présente comme un comportement inacceptable en entreprise, les moyens mis en place ont davantage tendance à cultiver la peur plutôt que le respect mutuel. Aujourd’hui, une femme sur trois a fait l’expérience de harcèlement et, parmi celles qui ont fait les frais des avances d’individus peu scrupuleux, seulement 5 à 15 % vont jusqu’à se plaindre à leur employeur. Et les spectateurs, qu’ils soient hommes ou femmes, restent silencieux, à l’écart. Le harceleur, aujourd’hui, fait l’objet de représailles plutôt que de punition, à moins que les plaintes contre une seule et même personne émanent de plusieurs femmes et arrivent en nombre suffisant pour ne plus être ignorées.
Dans certaines entreprises, malheureusement, il faut que le problème ait atteint son paroxysme pour qu’il soit enfin pris en compte. Peut-être qu’au final, ce n’est ni le harcèlement sexuel ni notre attitude qui a changé, mais le simple fait qu’il soit aujourd’hui pointé du doigt, dénoncé comme un scandale et un comportement inacceptable dans le monde
Marilyn GUILLAUME
1 commentaire
Bonjour,
Je recherche des statistiques récentes sur le harcèlement moral. Pourriez-vous m’indiquer vos sources concernant votre paragraphe « En 35 ans, qu’est-ce qui a changé ? »
« Aujourd’hui, une femme sur trois a fait l’expérience de harcèlement et, parmi celles qui ont fait les frais des avances d’individus peu scrupuleux, seulement 5 à 15 % vont jusqu’à se plaindre à leur employeur »