Le pouvoir disciplinaire fait partie de vos prérogatives d’employeur. Il permet de sanctionner la faute professionnelle commise par un des salariés. Mais cette notion de faute n’est pas précisément définie par le Code du travail. Il vous revient d’en apprécier la réalité et la gravité : faute simple, faute grave ou faute lourde. Chacune entraîne des conséquences différentes sur le contrat de travail du salarié : simple avertissement ou rupture du contrat de travail, versement de l’indemnité de licenciement ou non, etc.
L’enjeu pour l’entreprise est donc important, notamment pour éviter d’éventuels litiges.
Alors, qu’est-ce qu’une faute professionnelle et comment en apprécier la gravité ? Quelles sont les différentes catégories de fautes et leurs impacts sur le contrat de travail du salarié ?
Qu’est ce qu’une faute professionnelle ?
Les différentes fautes professionnelles
La faute professionnelle est un comportement volontaire du salarié que l’employeur peut sanctionner par le biais de la procédure disciplinaire. Il s’agit la plupart du temps d’un manquement du collaborateur à ses obligations découlant du contrat de travail : non-respect des règles d’hygiène et de sécurité, de son obligation de loyauté et de discrétion, des horaires, etc. Selon l’article L.1331-1 du Code du travail, une faute professionnelle correspond à un “agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif”.
Un salarié peut être licencié pour faute simple, faute grave ou faute lourde à la fin d’une procédure disciplinaire. Les conséquences du licenciement sur les droits du salarié sont différentes en fonction du motif de licenciement retenu par l’employeur.
La faute légère n’entraîne aucune conséquence sérieuse sur le fonctionnement d’une entreprise. Elle peut être assimilée à un comportement inapproprié à un moment T par exemple des retards occasionnels, des blagues déplacées mais pas mal intentionnées, des grossièretés etc. Cependant, elle n’engage pas de procédure de licenciement. L’employeur peut rappeler à l’ordre la personne ou lui faire parvenir une mise en garde écrite. Le blâme est en tête de liste parmi les sanctions disciplinaires.
La faute simple représente un agissement du salarié contraire à ses obligations à l’égard de l’employeur. Toutefois, sa gravité n’est pas suffisante pour imposer la rupture immédiate du contrat de travail. On peut parler de faute simple lors d’une erreur ou d’une négligence commise par le salarié dans le cadre de son travail.
La faute grave est assimilée à l’agissement du salarié contraire à ses obligations à l’égard de l’employeur. “ Son importance est telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, même pour la durée du préavis. “
Enfin, la faute lourde est d’une particulière gravité, et révèle une intention de nuire à l’employeur. Ainsi, le maintien du salarié dans l’entreprise est impossible, même pendant la durée du préavis.
Le salarié en désaccord avec son employeur sur la nature de la faute et sur le licenciement peut saisir le conseil le conseil des prud’hommes. C’est le juge qui détermine si le salarié a commis une faute et s’il s’agit d’une faute simple. Le juge peut également condamner l’employeur à des sanctions pour licenciement injustifié ou annuler le licenciement.
Quelles sanctions disciplinaires sont possibles ?
Dans certaines situations, le comportement du salarié peut constituer une faute. L’employeur est alors en droit de prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre du salarié. Cette sanction pouvant aller jusqu’au licenciement. L’employeur doit alors respecter une procédure disciplinaire. Le salarié peut contester la sanction disciplinaire.
Toujours selon le site du service public, une sanction disciplinaire est caractérisée par toute action (autre que des observations verbales) prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré comme fautif. “ Cette mesure peut remettre en cause immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. “
Voici quelques cas d’agissements pouvant entraîner une sanction disciplinaire :
- Le non-respect des règles de discipline fixées par le règlement intérieur ou par note de service
- Le refus de se conformer à un ordre de l’employeur
- Le non-respect de l’obligation de discrétion et de loyauté
- Des critiques, injures, menaces, violences de la part du salarié
- Des erreurs ou négligences commises dans le travail
- Toute forme de harcèlement (sexuel ou moral) commis par la personne en question
Pour être sanctionnée , la faute doit être avérée et imputable à l’employé (selon un arrêt de la Cour de Cassation, Chambre sociale : cass. soc. 21-3-2000 n° 98-40.130). Elle peut donner lieu à un licenciement. Mais ce n’est pas tout car la sanction peut aussi s’apparenter à un avertissement, un blâme, une mise à pied, une mutation ou une rétrogradation. Une remarque orale n’est pas considérée comme une sanction disciplinaire.
En outre, elle ne peut pas être sanctionnée deux fois. Enfin, une sanction disciplinaire doit être proportionnée par rapport à la faute commise.
Il est interdit d’infliger une amende ou toute autre sanction financière au salarié ayant commis une faute. Dans les entreprises où un règlement intérieur existe, les sanctions applicables sont uniquement celles qui sont prévues dans ce règlement.
Si la faute commise a causé un préjudice à l’employeur, le salarié peut être condamné à le réparer en versant à l’employeur des dommages-intérêts.
Attention également à sa prescription. L’entreprise dispose d’un délai de 2 mois pour engager la procédure à partir du moment où elle a connaissance du fait fautif.
Qu’est-ce qu’un licenciement pour motif personnel ? Contrairement à un licenciement économique, un licenciement personnel n’est pas collectif et ne relève pas d’un motif économique. Pour autant, le licenciement personnel est motivé par une cause réelle et sérieuse, relevant de la personne du salarié mais non liée à son inaptitude. Alors, à quoi est-ce dû ? Le plus souvent, le licenciement pour motif personnel non disciplinaire est lié à une insuffisance professionnelle ou à une incompatibilité avec la vie personnelle du collaborateur.
Un licenciement pour faute appartient à la catégorie des licenciements personnels mais son caractère disciplinaire le différencie du premier.
Qu’est-ce qu’une faute professionnelle dite simple ?
La faute simple peut faire l’objet d’une sanction disciplinaire sans conséquence sur le contrat de travail : blâme, avertissement (on parle alors parfois de faute légère). Mais en cas de faute professionnelle suffisamment sérieuse, la sanction peut aller jusqu’au licenciement du salarié fautif.
Pour rappel, l’employeur ne peut pas sanctionner un salarié dans les cas suivants :
- Motif discriminatoire
- Exercice d’une liberté fondamentale (liberté d’expression, liberté syndicale…)
- Témoignage de faits de harcèlement moral ou sexuel
- Témoignage de faits constitutifs d’un délit
- Exercice du droit de retrait pour danger grave et imminent
- Lancement d’alerte dans l’entreprise
- Exercice des fonctions de juré ou de citoyen assesseur
- Refus du salarié, en raison de son orientation sexuelle, d’une mutation géographique dans un État incriminant l’homosexualité
- Exercice du droit de grève dans le respect fixé par la loi
Si une procédure de licenciement est déclenchée, le salarié reste en poste pendant son préavis puis touche son indemnité de licenciement, s’il remplit les conditions lui permettant d’en bénéficier.
L’indemnisation de ce préavis diffère selon qu’il exécute effectivement le préavis, que l’employeur dispense le salarié de l’exécuter ou que ce dernier demande à en être dispensé. Ainsi, le salarié qui effectue son préavis perçoit une indemnité de préavis correspondant à son salaire habituel. Le service public précise : “ S’il est dispensé de préavis par l’employeur, il ne travaille pas. L’employeur lui verse une indemnité compensatrice de préavis correspondant au salaire qu’il aurait perçu s’il avait travaillé pendant cette période.” Pour finir, si l’employeur donne son accord pour le préavis, le salarié ne travaille pas et ne perçoit pas d’indemnité compensatrice de préavis.
Enfin, il perçoit une allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) s’il remplit les conditions lui permettant d’en bénéficier.
Quelques exemples de fautes simples pouvant justifier un licenciement :
- Répétition de fautes légères sur la durée
- Refus d’un changement dans les conditions de travail
- Retards répétés
- Désobéissance répétée aux consignes
Rappel. N’oubliez pas de vous référer au règlement intérieur de votre entreprise qui prévoit l’échelle des sanctions applicables dans l’entreprise : blâme, avertissement, mise à pied, licenciement,etc.
Qu’est-ce qui caractérise une faute professionnelle grave ?
La faute professionnelle grave : circonstances aggravantes
La faute grave peut être reconnue même si la faute est commise pour la 1re fois. Selon le site du service public, la faute grave est souvent admise dans les cas suivants :
- État d’ivresse pendant les heures de travail
- Absences injustifiées
- Indiscipline ou insubordination du salarié (refus d’effectuer une tâche de travail prévue dans le contrat)
- Harcèlement, violences ou injures envers l’employeur ou d’autres salariés
- Vols dans l’entreprise
Votre pouvoir disciplinaire vous permet donc de sanctionner la faute professionnelle commise par un salarié. Cette sanction est plus ou moins importante selon la gravité de la faute et peut aller jusqu’au licenciement.
Pour apprécier la gravité de la faute, l’employeur prend en compte l‘importance de la faute commise. Mais ce n’est pas suffisant. Il doit également se référer au contexte et à la situation du salarié qui peuvent constituer des circonstances atténuantes ou aggravantes.
Circonstances atténuantes :
- État de santé du salarié (selon un arrêt de la Cour de Cassation, Chambre sociale : cass. soc. 18-3-2015 n° 13-26.697)
- Difficultés personnelles du collaborateur (selon un arrêt de la Cour de Cassation, Chambre sociale : cass. soc. 29-4-2009 n° 07-42.293)
- Faute isolée et grande ancienneté du salarié. Les juges retiennent rarement la faute grave dans ces circonstances (selon un arrêt de la Cour de Cassation, Chambre sociale : cass. soc. 3-6-1997 n° 95-41.226)
- Faible valeur d’un vol. Cette circonstance peut écarter la faute grave sauf s’ il porte préjudice au client de l’entreprise
Circonstances aggravantes :
- Répétition des mêmes faits fautifs malgré une précédente sanction (selon un arrêt de la Cour de Cassation, Chambre sociale : cass. soc. 6-12-2011 n° 10-16.454)
- Position hiérarchique de l’employé (cadre, manager…)
Bon à savoir. L’appréciation de la gravité de la faute ne dépend pas d’un éventuel préjudice subi par l’entreprise. Dans le cas d’une faute grave, le collaborateur ne perçoit pas d’indemnité de licenciement, ni de préavis. Il perçoit des indemnités de Pôle Emploi s’il remplit les conditions nécessaires.
Quelles sont les fautes graves qui justifient un licenciement ?
La faute grave rend impossible le maintien de l’employé concerné dans l’entreprise et conduit donc à son licenciement.
En pratique, l’employeur écarte souvent le salarié de son poste par une mise à pied à titre conservatoire, en attendant la fin de la procédure. Cette dernière doit être lancée le plus rapidement possible après la connaissance des faits fautifs par l’employeur. Le salarié licencié pour faute grave ne touche aucune indemnité de licenciement ni de préavis (art.L1234-5 et L1234-9 du droit du travail).
Voici quelques exemples :
- Harcèlement, violences physiques, injures
- Abandon de poste et absences injustifiées
- Vols
- État d’ivresse pendant le temps de travail
Bon à savoir. La faute grave est également une cause de rupture anticipée d’un CDD.
Qu’est-ce qu’une faute lourde ?
Le licenciement pour faute grave résulte d’une violation des règles de discipline de l’organisation. La faute lourde du salarié est caractérisée par l’intention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise. La seule gravité des faits n’est donc pas suffisante pour caractériser la faute lourde.
Le licenciement est immédiat, sans indemnité de licenciement ou de préavis, en respectant bien entendu la procédure disciplinaire. En revanche, il peut bénéficier de l’indemnité compensatrice de congés payés. Il perçoit des indemnités de Pôle Emploi s’il y est éligible.
Le salarié peut également être amené à indemniser l’entreprise du préjudice subi si sa responsabilité est engagée.
À noter que depuis 2016 et une décision du conseil constitutionnel, la faute lourde ne prive plus le salarié de son indemnité compensatrice de congés payés.
Des exemples de fautes lourdes :
- Harcèlement moral ou sexuel
- Blocage de l’accès à l’entreprise aux salariés non grévistes
- Séquestration d’un membre du personnel
- Détournement de la clientèle par un cadre au profit d’un concurrent
- Sabotage de machines
- Falsification de documents par un directeur financier pour masquer des malversations financières
- Agression physique ou menace de mort envers l’employeur
- Communication d’informations confidentielles
- Dénigrement de l’entreprise
- Espionnage industriel
- Détournement de fonds
Bon à savoir. La qualification de faute lourde est la seule qui permet de licencier un salarié gréviste selon le droit du travail.
Céline Le Friant et Laurène Boussé
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