Au cours des dernières le marché français de l’externalisation de la paie et des RH a vu naître un certain nombre de nouveaux acteurs. En 2004, on comptait, en France, une dizaine de sociétés de service. Aujourd’hui, ce chiffre a été multiplié par trois voire par quatre. Mais alors, comment s’y retrouver et opter pour le bon prestataire ? L’externalisation de gestion de la paie doit être appréhendée sans précipitation et avec beaucoup de vigilance. Il faut cadrer et étudier la faisabilité du projet afin de choisir le bon partenaire, car il le sera pour quelques années. Pour ne pas avoir de mauvaises surprises, il est important de se poser les bonnes questions. Petit guide méthodologique
« Le marché de l’externalisation compte un très grand nombre de prestataires avec plus ou moins d’expérience. Choisir une structure ayant moins de cinq ans d’existence, comporte un risque », souligne Christophe Patte, dirigeant fondateur du cabinet de conseil Human Start Consulting*. Avant la mise en place de tout projet d’externalisation, il est important d’avoir une visibilité sur les compétences du prestataire mais aussi sur la façon dont fonctionne ses équipes. Il convient également de vérifier si ce dernier possède ses propres outils informatiques, tout comme il est essentiel de passer en revue la méthodologie projet qui sera appliquée le cas échéant.
Tout ceci est un gage de la qualité des prestations qui pourraient potentiellement être fournies par la société d’externalisation. Pour mesurer la qualité des prestations, les spécialistes RH invitent l’entreprise à se poser deux questions : les bulletins de salaire comportent-ils de nombreuses erreurs ? Les délais sont-ils respectés ? Si la réponse est non à l’une de ces deux questions, passez votre chemin !
La qualité des équipes
Avant toute chose, il est essentiel de vérifier les compétences des personnes qui auront la charge de mener vers la réussite votre projet d’externalisation de la gestion de la paie. « Les compétences en Droit de la sécurité sociale doivent être réelles », insiste Christophe Patte avant de surenchérir « plus qu’un service juridique, il doit s’agir d’un bureau social. L’équipe projet doit être capable de suivre les évolutions législatives mais aussi de maîtriser les conventions collectives ». Autre point de détails à prendre en compte : la structure des effectifs. « Combien de personnes travaillent au service paie ? Au service juridique ? N’hésitez pas également à consulter les CV et bien sûr, demandez à rencontrer les équipes », conseille vivement le cabinet de conseil Human Start Consulting.
Pour Olivier Rouas, Directeur commercial Cegedim SRH, « engager un projet d’externalisation, c’est avant tout construire un partenariat de service sur une durée moyen/long terme. Des hommes vont collaborer ensemble, la relation humaine est donc essentielle. Certains clients font l’erreur de partir sur un projet d’externalisation comme ils partent sur un projet progiciel, oubliant ainsi la dimension humaine qui constitue pourtant un des fondamentaux de la réussite du projet ».
La démarche outil
Attention aux sociétés qui externalisent leurs moyens informatiques. Car en ajoutant des intermédiaires, vous exposez votre entreprise non seulement à des risques d’erreurs mais aussi à un allongement de la durée de traitement de vos dossiers. Afin de vérifier que le prestataire propose une solution informatique viable, cohérente et pérenne, Christophe Patte recommande de visiter la salle des machines mais aussi de questionner le prestataire sur les points suivants :
« Comment la solution est-elle gérée ? Où les informations sont-elles hébergées ? Quelles sont les solutions de back up ? Dans quel langage informatique, l’application a-t-elle été développée ? Est-il simple de trouver des compétences sur le marché ? ».
La méthodologie projet
Externaliser, c’est adopter une méthodologie projet. « On n’externalise pas seulement un processus informatique », met en garde le spécialiste RH. Et pour cause, certains prestataires positionnés comme des éditeurs de solutions, n’ont pas hésité à élargir leur champ d’actions. Mais attention, « ils sont souvent restés dans la logique de l’éditeur », précise Christophe Patte avant d’ajouter que « certains prestataires oublient d’analyser les flux internes de gestion, les plannings paie ». Une erreur qui peut coûter cher. Voilà pourquoi il est essentiel de poser des questions telles que : quelles sont les garanties concernant la mise en place de la nouvelle solution paie ? Concernant les moyens informatiques, quelles sont les garanties en termes de disponibilité des applications ?
Les engagements contractuels
Bien souvent, les contrats restent vagues et ne détaillent pas précisément la prestation. « Demander à ce que tout soit écrit noir sur blanc, permettra d’éviter de voir votre budget malmené. N’hésitez pas à demander ce que comprend le coût de l’externalisation de la paie. Listez les tâches et les sous-tâches, identifiez clairement les déclarations sociales que le prestataire effectuera et celles dont vous garderez la charge », conseille Christophe Patte. Vous êtes également en droit de demander à ce que soit établie une convention de service définissant clairement les obligations de moyen et les obligations de résultats. Envisagez tous les cas de figure y compris celui où il y aurait un problème lié aux déclarations sociales. Le contrat qui lie l’entreprise et le prestataire doit, en effet, être rédigé dans les moindres détails et répondre à des interrogations portant sur le délai de réponse du prestataire ou encore la personne habilitée à intervenir. Ces informations doivent figurer en annexe du contrat, tout comme la répartition précise des responsabilités de chacune des parties mais aussi les indicateurs de qualité indexés sur le coût et les conditions de sortie de contrat.
La gestion du changement
« Externaliser ne signifie ni supprimer la Direction RH ni se laisser « driver » par un prestataire », rappelle le cabinet Human Start Consulting. En tout état de cause, l’externalisation ne change rien pour le salarié. En revanche, « un déficit de communication en interne est souvent ressenti. C’est pourquoi l’entreprise doit veiller à conserver un relais qui soit capable d’expliquer une fiche de paie et d’apporter des conseils », insiste Christophe Patte. Enfin pour le dirigeant du cabinet Human Start Consulting, il est essentiel de garder la main sur les processus stratégiques. « Ce serait une erreur de donner carte blanche au prestataire. Les décisions stratégiques restent de la responsabilité de la DRH », argumente-t-il.
Le suivi dans le temps
Enfin, il est essentiel de considérer l’externalisation comme un mode projet. « Le suivi permet de se placer dans une logique de progression continue. Un projet d’externalisation se construit dans le temps et atteint son rythme de croisière au cours de la deuxième année », indique Christophe Patte. L’entreprise peut par exemple, opter pour une réunion mensuelle avec la personne en charge du dossier client. Cette dernière permet, en effet, de suivre le planning du mois précédent et d’établir celui du mois suivant. C’est lors de ces rencontres que seront vérifiés chacun des indicateurs de qualité définis dans le contrat. Un point essentiel pour la réussite pérenne d’un projet d’externalisation de la paie.
Emilie Vidaud