Comment favoriser le retour à l’emploi des femmes victimes de violences ?
Dans leur ouvrage “Je travaille donc je suis” (2018), Iman Karzabi et Séverine Lemière mettent en avant l’importance de ce sujet, parfois passé sous silence :
“L’emploi et les violences faites aux femmes sont deux enjeux majeurs de l’égalité entre les femmes et les hommes. Mais rares sont les études qui les traitent conjointement, qui analysent leurs relations et explorent leurs intersections (…) Pourtant, les associations qui accompagnent les femmes victimes de violences mettent en avant l’enjeu de l’emploi.”
Or, les violences faites aux femmes, notamment conjugales, sont un réel obstacle à leur retour à l’emploi.
Éclairages.
Quand les violences conjugales sont un frein à l’insertion professionnelle
Selon le Ministère de l’Intérieur, les victimes de violences commises au sein du couple sont majoritairement des femmes, à près de 90 %. Une situation qui ne favorise pas leur insertion professionnelle. Leur accès à l’emploi, et la pérennité de ce dernier, demeurent précaires.
Une source gouvernementale indique également que les conséquences des violences faites aux femmes se traduisent par des situations de précarité et d’exclusion (ex. difficultés liées à la santé financière, difficultés administratives, d’insertion professionnelle, etc.), sans parler des conséquences sur la santé physique et psychique.
En Île-de-France, les femmes en situation de chômage et les étudiantes ont un indicateur global de violences conjugales 2 fois plus élevé que les autres femmes. On observe aussi que 86 % des franciliennes victimes de violences qui sollicitent une “mise en sécurité” n’occupent aucun emploi. Des chiffres qui illustrent une certaine corrélation entre les violences et l’accès à l’emploi :
Les violences subies par les femmes constituent un frein important à leur insertion professionnelle. (…) Et pourtant la question des violences n’est que très rarement prise en compte lors de l’accompagnement de ces femmes vers l’emploi.
Agir pour le retour à l’emploi des femmes victimes de violences
Ainsi, les acteurs et actrices de l’emploi, mais aussi les entreprises, ont un rôle important à jouer en ce sens. Il s’agit non seulement d’être capable de repérer les signaux faibles de violences conjugales ou intrafamiliales, mais aussi de pouvoir venir en aide aux femmes concernées en les orientant de façon pertinente.
Voici les conseils du guide de l’Observatoire Régional des Violences Faites aux Femmes (ORVFF) à destination des acteurs et actrices de l’emploi pour favoriser le retour à l’emploi des femmes victimes ou l’ayant été :
- S’informer et se former quant aux spécificités des violences faites aux femmes ;
- Identifier les femmes victimes de violences parmi le public accompagné en se questionnant systématiquement ;
- Orienter les personnes concernées vers un réseau de professionnels spécialisés à l’accompagnement des femmes victimes ;
- Co-construire un dispositif de lutte auprès d’une association spécialisée dans l’accompagnement vers l’emploi des femmes victimes de violences ;
- Construire un dispositif interne d’accompagnement des femmes victimes vers l’emploi.
Les violences conjugales ont eu une incidence sur le monde du travail : on est partis de cela pour permettre aux entreprises de s’emparer du sujet. Ce n’est pas l’affaire de l’intime : c’est un fait de société qui dépasse la sphère de la vie privée
- Le saviez-vous ? En entreprise, il est possible de désigner une personne référente sur la question des violences faites aux femmes.
Des entreprises qui s’engagent ?
Aujourd’hui, un certain nombre d’entreprises affichent un engagement sans fard dans la lutte contre les violences faites aux femmes et pour le retour à l’emploi des femmes victimes de violences. Mais que mettent-elles exactement en place ?
Dernièrement, le groupe La Poste a signé une convention avec la Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes (FNCIDFF) pour mettre en place un dispositif d’accompagnement pour le retour à l’emploi des femmes victimes de violences conjugales.
Selon le groupe, le dispositif se déploie en collaboration étroite entre les assistants et assistantes sociales de La Poste et les conseillers et conseillères en insertion professionnelle des CIDFF.
Ce partenariat a aussi pour objectif de développer des relais de communication pour permettre un “accès facilité aux structures de soutien aux victimes”.
Carrefour fait également partie de ces entreprises ayant signé une convention avec la Fédération nationale des CIDFF. Un partenariat qui s’articule autour de 4 grands champs d’action :
- La création de liens entre les magasins et les antennes locales de la fédération en faveur d’un maillage territorial au plus près des besoins des femmes victimes de violences ;
- L’organisation de journées de découvertes des métiers de l’enseigne pour les personnes suivies par la fédération (avec des périodes de “mise en situation professionnelle permettant de découvrir un métier et valider un projet professionnel”.
Mais les entreprises restent peu nombreuses à développer ce type de partenariats.
La rédaction vous conseille aussi :
- Mixité des métiers : déconstruire les stéréotypes liés au genre
- Octobre rose en entreprise : comment impliquer vos salariés ?