Lors d’un apéritif Facetime, devenu très prisé en cette période de confinement, une amie me raconte que depuis le 10 mars son entreprise l’a placé en arrêt de travail total, c’est à dire en chômage partiel. En effet, étant commerciale et de surcroît sur le terrain 5 jours sur 7, impossible de continuer son activité. Quinze minutes plus tard, elle déclare devoir nous laisser, car elle doit rendre son rapport d’activité détaillé à son manager qui attend son document Excel pour demain 9h. De toute évidence, il y a un problème.
Argument 1 : “Le chômage partiel à condition que le travail soit terminé”
Alexandra me raconte : “Mon manager nous dit que pour préparer la sortie de crise, il est impératif que nous lui communiquions nos chiffres et nos bases clients et prospects à jour, il nous a envoyé à tous un fichier Excel que nous devons compléter, j’en ai pour 3 ou 4 heures de travail. Le manager a précisé que ce travail aurait dû être rendu avant le 10 mars, comme le rendu est en retard, selon lui il faut terminer le travail maintenant, qu’il y ait chômage partiel ou pas. Il nous a prévenus que nous n’avons pas vraiment le choix».
Ce que j’en pense
Si nous avons bien compris la teneur d’un dispositif d’activité partielle, voici comment ça fonctionne, pour tous : si l’entreprise fait travailler des salariés alors qu’ils sont en chômage partiel, cela s’apparente à une fraude. Passer outre cette interdiction est assimilé à du travail illégal. Donc comme expliqué à Alexandra, un employé en chômage partiel à qui l’employeur demande de travailler doit refuser cette requête. Même si certains employeurs peuvent faire pression en présentant ces contraintes de travail comme une obligation, ce genre de pratique est hors la loi.
Argument 2 : “On doit pouvoir compter sur ses fidèles collaborateurs, on se souviendra de ceux qui ont aidé ”
Alexandra me relate les propos de son manager : “L‘entreprise se souviendra au moment du déconfinement de ceux qui ont joué le jeu ou pas, ceux sur qui on peut compter”. De toute évidence, elle a peur de se faire licencier à la sortie de crise ou que son manager la harcèle si elle refuse de jouer le jeu de travailler en période de chômage partiel.
Ce que j’en pense
Cette entreprise, ou plutôt ce manager, car on ne sait pas s’il agit sous couvert ou non de son employeur, devrait se méfier pour deux raisons, car si Alexandra décide de dénoncer son entreprise :
- D’une part, l’entreprise risque très gros : amende, sanction pénale, remboursement des sommes perçues, privation des aides de l’état.
- D’autre part, le manager en question devra répondre de ses actes pendant la crise et il y a fort à parier qu’il servira d’exemple et sera licencié et poursuivit en justice.
Mais dans notre triste réalité, cela n’arrivera pas, car Alexandra a quitté notre apéro et a honoré le travail demandé par son manager, activité partielle ou pas, la question ne se pose pas, car elle a peur de perdre son emploi à l’issue du confinement. Si demain son manager lui donne d’autres prérogatives, elle répondra malheureusement présente, par peur de représailles.
Didier RHabilleur