Le Sénat vient de voter la création d’un CDI senior destiné aux personnes de plus de 60 ans. La majorité sénatoriale de droite et du centre défend en effet la création d’un contrat de travail inédit, comprenant exonération de cotisations famille pour l’employeur. Le but ? Inciter à l’embauche des seniors de plus de 60 ans. Mais le gouvernement reste circonspect, évoquant le coût que cela peut représenter : 800 millions d’euros.
Dans le cadre de la réforme des retraites, ce dispositif avec l’instauration d’un index senior, semble faire partie des mesures phares défendues par la majorité sénatoriale LR et centriste.
Eclairages.
Pourquoi créer un contrat en « CDI senior » ?
Le but de ce nouveau dispositif gouvernemental qu’est le CDI pour les personnes âgées ? Créer un contrat spécifique, dédié aux personnes de plus de 60 ans, « avec une exonération de cotisations famille pour l’employeur, pour inciter les entreprises à embaucher », rappelle la chaîne politique et parlementaire Public Sénat. Ce contrat pourrait durer jusqu’au jour où le collaborateur peut prendre sa retraite.
Le taux d’emploi des seniors en France est un enjeu de taille, notamment à l’heure de l’allongement de l’âge de départ à la retraite prévu par le gouvernement.
Ce contrat « fin de carrière » permettrait – selon le rapporteur LR René-Paul Savary, auteur avec Elisabeth Doineau (centriste) de l’amendement établi – d’adapter les conditions de travail des employés selon leur âge ou le « phénomène d’usure ». Un enjeu d’autant plus crucial à l’heure où la QVCT, le bien-être des salariés, fait partie des défis de la fonction RH.
Si le principe est inscrit dans la loi, l’amendement prévoit qu’il soit ensuite « discuté entre partenaires sociaux, dans le cadre des négociations », avant la prise du décret d’application. L’idée du sénateur LR de la Marne est de laisser syndicats et patronat « définir par branche » le recours au CDI senior, ou pas. « Si des branches ne sont pas intéressées, il n’y a pas de contrat », précise le rapporteur.
Un gouvernement circonspect
Face à la volonté de créer un contrat en CDI senior, ou « contrat de fin de carrière », le gouvernement se montrerait « très circonspect » selon Public Sénat, « pour ne pas dire opposé à ce CDI (…) dont l’amendement a reçu un avis défavorable du gouvernement ».
Gabriel Attal, ministre des Comptes publics, s’est ainsi exprimé sur le sujet, évoquant son scepticisme concernant les « allégements de cotisation ciblés sur un âge ». Ce qu’il pointe en particulier ? Un risque dit « d’effet aubaine », ou « de seuil ».
« Si vous exonérez à partir de 60 ans, qu’est-ce qui va se passer pour les gens qui ont 58 ou 59 ans, qui veulent être recrutés ? On va leur dire vous nous coûterez plus cher qu’à 60 ans, alors attendons deux ans », ainsi que l’explique Gabriel Attal, qui insiste sur le coût de 800 millions d’euros pour la branche famille, « qui se retrouve déficiaire dès l’année 2025 » dans le cas où les recrutements actuels, passé 60 ans, s’effectuent avec le CDI senior.
Pire : si tous les salariés de plus de 60 ans en CDI classique voient leurs contrats « basculer » en CDI senior, le coût serait alors de « 2,3 milliards d’euros », selon Gabriel Attal. Il note par ailleurs que le dispositif « favorisera les hauts revenus, ceux pour qui la question des cotisations n’est pas l’élément déterminant pour les employeurs ».
CDI senior : pas l’unanimité
Bruno Retailleau, président du groupe LR, a toutefois exprimé son désaccord, défendant fermement l’amendement portant sur le CDI senior à destination des collaborateurs de plus de 60 ans : « Il y aurait eu un effet d’aubaine si le contrat s’adressait aux plus de 60 ans déjà dans l’entreprise. Cela ne sera pas le cas, ce sera des gens qu’on sort du chômage », soutient-il avec ferveur. Bruno Retailleau considère même que cette mesure rapportera, au lieu de coûter.
De son côté, la gauche dénonce cette proposition, regrettant des « nouvelles baisses de cotisations » favorables aux sociétés. Selon Bernard Jomier, sénateur du groupe PS, il faut maintenir ces cotisations qui « financent notre système de protection sociale ».
Quant à Monique Lubin, la socialiste aurait « préféré qu’on demande aux entreprises, en fonction de certains critères, de recruter des seniors pour qu’elles puissent garder les différentes exonérations dont elles ont déjà droit », ne comprenant pas « pourquoi on est toujours obligés de faire des cadeaux aux entreprises pour qu’elles recrutent des gens ».
Olivier Dussopt, ministre du Travail, propose dans un premier temps que le dispositif de création d’un tel CDI soit expérimental. Selon la chaîne parlementaire et politique, ce dernier ne semble pas complètement fermer la porte à la proposition d’un CDI senior, « sans pour autant la généraliser tout de suite ».