Le 29 février 2012, le gouvernement français faisait entrer le télétravail à domicile dans le Code du travail avec la loi Warsmann.
N’attendant pas cette première reconnaissance juridique, Renault signait dès 2007 un accord sur le télétravail avec ses partenaires sociaux et devenait l’un des pionniers de son secteur d’activité sur cette question. Cinq ans plus tard, le nombre de 1 000 télétravailleurs est dépassé et le dispositif n’en finit pas de progresser.
Eric Couté,responsable télétravail/mobilité chez Renault, revient sur la stratégie de l’entreprise sur cette question, au cœur de la politique RH.
Quel a été le contexte, il y a cinq ans, de la signature de cet accord télétravail ?
Le télétravail à domicile chez Renault France a été clairement officialisé en janvier 2007 par un accord signé par tous les partenaires sociaux. Notre ambition première était de permettre aux collaborateurs de bénéficier d’un meilleur équilibre vie privée et vie professionnelle. C’est un accord qui a été proposé au plan RH dans un contexte de mondialisation de nos activités alors que nous avions déjà des infrastructures opérationnelles en matière d’informatique et de communication à distance. Nous n’avions pas à demander d’efforts considérables à la direction des services informatiques pour mettre en place le dispositif, les outils existaient déjà, ce qui facilitait largement la tâche.
Quelles étaient les grandes lignes de l’accord ?
Selon les termes de l’accord, le télétravail à domicile chez Renault se fait sur la base du volontariat, selon la demande des collaborateurs et à l’approbation de leur supérieur hiérarchique. Il obéit également à une règle de réversibilité : il est clair, qu’il ne s’agit pas d’une forme d’organisation du travail que l’on est susceptible de pratiquer toute sa carrière. Il faut bien entendu que cette nouvelle disposition soit adaptée au salarié, son équipe et au contenu de son activité. Dans l’accord de 2007, il était possible de télétravailler de deux à quatre jours fixes, moyennant la signature d’un avenant au contrat de travail et la définition de plages horaires précises. Depuis 2010, le dispositif est également ouvert aux collaborateurs qui souhaiteraient travailler à domicile une journée par semaine, voire dans deux résidences.
Qui est concerné par le télétravail chez Renault ?
Notre dispositif en faveur du télétravail est largement déployé chez Renault puisque nous avons dépassé le nombre de 1 000 télétravailleurs en mars dernier (soit 4 % de la population éligible, N.D.L.R.) et que nous recensons 258 fonctions et métiers. Le télétravail concerne, à partie équivalente les hommes (52 %) et les femmes (48 %) et s’adresse aussi bien aux cadres (46 %) qu’aux employés/techniciens. On retrouve des télétravailleurs dans des fonctions aussi diverses que le commerce, l’ingénierie, les fonctions support, la communication, la RH… Nous n’avons pas mis en place de référentiel métier comme le font d’autres grandes entreprises, nous considérons que le télétravail est accessible à tous en fonction des activités exercées, sauf en production, bien sûr.
Quels sont pour vous les apports du télétravail en entreprise ?
Pour le collaborateur, le télétravail offre un avantage évident d’équilibre entre vie privée et vie professionnelle avec, entre autres, beaucoup moins de temps passé dans les transports. Ce seraient ainsi cinq millions de kilomètres qui auraient été économisés chaque année par ces télétravailleurs au sein de Renault. Un gain de temps bien sûr, des économies de CO2 mais aussi une réduction des risques liés au trajet domicile-travail. Les managers de leur côté affirment se retrouver face à des collaborateurs plus sereins, moins fatigués, mieux concentrés, plus efficaces et qui sont de réels atouts dans les équipes. Par la nouvelle organisation du travail qu’il suppose, le télétravail a également permis de revoir nos façons de faire en termes de planification de réunions, d’optimisation des processus et de meilleure utilisation des outils collaboratifs. C’est également un dispositif qui contribue à la dématérialisation du papier avec un recours naturel et de plus en plus systématique aux solutions de communication mis à notre disposition.
Quels outils avez-vous mis en place pour accompagner vos équipes ?
Il est certain que le télétravail a bouleversé les habitudes de travail et que l’appropriation de ce nouveau mode d’organisation ne se fait pas de la même façon selon les individus et les profils d’équipes. Pour accompagner ces changements, nous avons mis en place des outils d’information (comme un site intranet par exemple), de sensibilisation et de promotion accessibles aussi bien aux télétravailleurs qu’aux managers. Il s’agit pour nous d’aider et de conseiller les collaborateurs dans leur projet de télétravail, de l’idée jusqu’à la concrétisation. Nous souhaitons également mettre en évidence les apports pour les managers, pour que les prises de décisions se fassent en toute connaissance de cause. Comme outil spécifique, nous avons créé un programme d’e-learning baptisé « Travail à distance » qui vise essentiellement à améliorer la maîtrise des solutions de communication à distance et propose des parcours individualisés de formation sur cette question particulière. Dans cet espace, nous avons également intégré des modules pour traiter de l’ergonomie au poste de travail : chez nous en plateau, comme à leur domicile, les salariés doivent travailler dans les meilleures conditions possibles.
Et quelles nouvelles perspectives pour le télétravail chez Renault ?
Notre ambition est de continuer à soutenir le déploiement et l’appropriation du télétravail par de plus en plus de métiers. Nous travaillons à ce que chaque salarié, quelle que soit sa fonction, se retrouve à l’aise sur cette question et puisse envisager, un jour, de faire partie du dispositif. C’est un sujet qui doit de plus en plus se banaliser. Si notre accord ne concerne que Renault France, nous cherchons également à partager notre expérience avec les autres pays dans lesquels nous sommes implantés. Nous souhaitons notamment répondre aux problématiques de temps de transports auxquelles nous sommes largement confrontés – je pense au Brésil, à la Roumanie ou à l’Espagne par exemple.
Audrey Caudron-Vaillant