Rencontre avec Sophie Daviaud, responsable des conférences sur le salon Big Data Paris qui se tiendra du 1er au 2 avril prochain au CNIT de Paris.
Où en est actuellement le Big Data auprès des entreprises françaises et dans quels secteurs se développe-t-il ?
Selon une étude du cabinet IDC pour la société allemande de vente de logiciels SAP, 19 % des entreprises françaises de plus de 100 salariés pilotent actuellement un projet Big Data. Si jusqu’à présent, le grand public connaissait surtout le Big Data dans le domaine du marketing, il se développe aussi dans les secteurs de la maintenance, de la logistique, des transports, de la finance, de l’assurance, de la santé, des réseaux énergétiques (…) ou encore dans celui des ressources humaines.
Comment ces projets sont-ils menés ?
Le profil parfait, à même de mener ce type de projet, a été défini par l’appellation « Data Scientist ». Cette personne aurait, dans l’idéal, des compétences statistiques, mathématiques, informatiques mais aussi une bonne connaissance des besoins métiers. C'est-à-dire qu’elle serait à même de déterminer et de comprendre, quel que soit le service de l’entreprise (maintenance, logistique, marketing…), leur intérêt propre à utiliser le Big Data. Dans les faits, ce type de profil est difficile à trouver. Aussi, malgré des logiciels très puissants, accessibles sur le marché et permettant de donner vie au Big Data, le volet humain pose problème. Cet outil seul n’a pas vraiment de valeur, s’il n’y a pas de personne en interne ou en externe qui soit capable de l’utiliser et de le mettre en corrélation avec les attentes et les problématiques de l’entreprise.
Existe-t-il aujourd’hui des formations à-même de développer ces compétences ?
Le premier master Big Data a été lancé en septembre dernier par Telecom Paris Tech. Ce n’est qu’un début puisqu’à l’instar de "Grenoble Ecole de Management", beaucoup d’écoles de commerce et d’ingénieurs se positionnent et vont prochainement lancer leur diplôme. Ces professionnels seront le point de convergence des projets Big Data, l’interface avec les outils et les métiers dans l’entreprise.
La mise en place concrète du Big Data en entreprise semble toujours être une démarche longue et fastidieuse, comment l’expliquer ?
Si le Big Data véhicule souvent l’impression d’un projet colossal nécessitant beaucoup de temps et de moyen, de nombreux fournisseurs démontrent qu’il est désormais possible de mettre sur pied des projets pilotes rapidement. Leur objectif est avant tout de prouver aux entreprises l’intérêt majeur du Big Data et de les inciter à se lancer. Il y a des différences de mentalités sur cette question entre la France et l’étranger. Chez nous, il est d’usage de formaliser en amont des projets de grande envergure avec des objectifs souvent lourds, peut être trop ambitieux, qui s’avèrent longs et nécessitent beaucoup de moyens. En Amérique du Nord, par exemple, l’approche consiste à lancer des tests, des pilotes, sur des thématiques très ciblées, dans un laps de temps limité. Cela donne ainsi des résultats plus rapides et surtout visibles au regard des entreprises. De plus, cela engendre peu de risque car les moyens financiers investis sont moins importants et un éventuel échec est dès lors plus acceptable.
Qu’en est-il du Big Data RH ?
Il existe d’ores et déjà certaines plateformes qui utilisent ce procédé. Je pense au site Pearl Digital, un site de recrutement qui identifie, anticipe et calcule le pourcentage de chance d’un candidat de réussir ou non sa période d’essai sur un poste défini dans une entreprise donnée. D’autres beaux projets sont également en marche, même si le Big Data RH pose toutefois une problématique. Là encore, la notion humaine est au centre de toutes les attentions. Nombreux sont les acteurs du secteur qui se questionnent sur l’objectivité et les travers de cet outil. Avec le Big Data RH, où commence et où s’arrête le travail de la machine ? Et quel est, dès lors, le degré d’implication du recruteur, la pertinence de son expertise ? Certains professionnels s’interrogent…
Gérald Dudouet