Si le gouvernement propose en cette période de crise coronavirus des dispositifs permettant aux entreprises de bénéficier de l’activité partielle ou de dérogation à la prise de congés payés, encore faut-il que les entreprises de plus de 11 salariés aient respecté la mise en place du CSE au 1er janvier 2020. Le décret concernant l’activité partielle fixe un délai de 2 mois à compter de votre demande pour consulter le CSE et transmettre l’avis du CSE à l’administration. À défaut, le risque principal est le refus d’indemnisation au titre de l’activité partielle.
Comment s’y prendre pour le mettre en place dans l’urgence et respecter les délais ?
Rappel sur le CSE
Le Comité social et économique (CSE) est la nouvelle instance de dialogue entre employeur et salariés au sein de l’entreprise. Il doit être mis en place dans toutes les entreprises d’au moins 11 salariés. Il est facultatif pour les autres. Le CSE fusionne et se substitue à toutes les autres instances représentatives du personnel : délégués du personnel, comité d’entreprise et comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).
Le CSE est une instance unique de représentation du personnel composée de l’employeur et d’une délégation élue du personnel comportant un nombre de membres fixé en fonction de l’effectif de l’entreprise. Un comité social et économique (CSE) est mis en place dans les entreprises d’au moins 11 salariés. Sa mise en place n’est obligatoire que si l’effectif d’au moins 11 salariés est atteint pendant 12 mois consécutifs. Dès lors que les conditions d’effectif sont remplies, le CSE doit être mis en place dans l’entreprise.
Comment mettre en place le CSE dans votre entreprise
Vous pouvez consulter en accès libre les procédures de mise en place du CSE sur le site du gouvernement. De nombreux éditeurs juridiques proposent également des dossiers très complets sur les modalités de mise en place du CSE : les éditions Tissot, Juritravail.
Nous avons recueilli les propos de Marine Dubois, Directrice de l’offre juridique chez Legalplace et ex-avocate pour y voir plus clair sur la procédure de mise en place du CSE
“La procédure de mise en place du CSE prend au minimum 1,5 mois, ce délai est lié aux impératifs fixés par la loi.” “Nous conseillons aux entreprises n’ayant pas mis en place de CSE, de décaler de quelques jours leur demande de chômage partiel afin de se laisser un peu temps pour régulariser leur situation.”
Marine Dubois nous éclaire sur la procédure à suivre :
- C’est à l’employeur de déclencher les élections pour constituer le CSE
- Le CSE est mis en place à l’issue d’une élection dont les modalités sont prévues par un protocole d’accord préélectoral (définissant notamment qui sont les électeurs, les dates des deux scrutins, les modalités d’élection) entre l’employeur et les syndicats. L’employeur va donc informer les salariés de la mise en place d’élections et inviter les organisations syndicales nationales à venir négocier un protocole d’accord préélectoral avec un délai minimum de prévenance de deux semaines à compter de la réception du courrier d’invitation . Cette phase prend en général 3 semaines.
- Une réunion est organisée avec les syndicats pour valider et signer ce protocole .(Cas 1 – si les syndicats ne se présentent pas, l’employeur valide le protocole par décision unilatérale, Cas 2 – si les syndicats viennent et signent le protocole, la procédure se poursuit sur les bases convenues dans le protocole, Cas 3 – si les syndicats ne signent pas tous, il faudra saisir la DIRECCTE pour demander une ventilation des sièges et des salariés entre les collèges.) À date, rien ne s’oppose légalement à ce que la réunion avec les syndicats se déroule en visioconférence.
- L’employeur doit informer ensuite les salariés, via une note de service, des modalités de mise en place des élections.
- Le scrutin doit être est organisé dans les 90 jours au maximum qui suivent l’information des salariés, avec un scrutin à deux tours.
- Il faut laisser environ a minima 1 semaine aux salariés pour se présenter comme candidats à chacun des tours. Au 1er tour peuvent candidater les salariés qui sont exclusivement issus d’une liste syndicale et au second tour tous les salariés de l’entreprise non apparentés à l’employeur à condition qu’ils aient plus d’un an d’ancienneté et qu’ils soient majeurs.
- Le vote peut se faire de façon électronique, à ce titre LegalPlace propose une solution sécurisée et certifiée par la CNIL.
- Un bureau de vote composé de trois salariés de l’entreprise va pouvoir sceller numériquement une urne digitalisée, ce qui va déclencher un envoi de mail aux salariés les invitant à voter (avec un mot de passe sécurisé), le bureau de vote pourra en fin de journée desceller l’urne et ainsi obtenir automatiquement les résultats du vote. Ces résultats sont automatiquement transmis aux salariés.
- Les procès-verbaux des résultats, automatiquement générés par la solution LegalPlace à l’issue des scrutins, doivent être transmis en deux exemplaires à l’inspection du travail et au CTEP, une copie devant être remise aux organisations syndicales qui ont présenté des listes de candidats ou qui ont participé à la négociation du protocole d’accord préélectoral.
En conclusion si l’on cumule les 3 semaines concernant le protocole d’accord, et le délai de préparation des scrutins (2 x 1 ou 2 semaines), on obtient au minimum 5 à 6 semaines de procédure soit 1,5 mois.
D’autres solutions de vote électronique existent, Voxaly, filiale de Docaposte, propose également une solution de vote électronique. Xavier SECHER, Directeur du développement chez Voxaly : “Voxaly organise tout type d’élections au service des entreprises du secteur privé (grands groupes, ETI, PME/PMI, TPE…), des collectivités et organisations de la fonction publique territoriale et hospitalière, des banques, mutuelles et assurances.”
“Nous proposons une solution sécurisée qui comprend tout depuis l’intégration des fichiers jusqu’à la génération des codes personnalisés, à la clôture des votes, le système intègre l’édition automatisée des PV Cerfa, l’édition des émargements et la traçabilité des opérations qui doit être conservée pendant un délai de 15 jours.”
“Nous proposons également deux autres solutions, l’une pour gérer les heures de délégations, l’autre pour organiser le vote à distance sur application mobile pendant les réunions de CSE qui peuvent être réalisée en visioconférence, depuis 2016, toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, sont concernées. Le recours à la visioconférence, pour réunir le CSE à distance, est autorisé par accord entre l’employeur et les représentants du personnel. Dans ce cas, la visioconférence est accompagnée d’une solution de vote électronique. En l’absence d’accord, ce recours est limité à trois réunions par année civile. En cette période de crise, les entreprises ont besoin de consulter leurs élus et peuvent donc le faire à distance.” souligne Xavier SECHER
Que risquez-vous si vous ne mettez pas en place le CSE ?
À court terme, vous vous privez définitivement des mesures de la loi urgence relatives notamment au recours à l’activité partielle. Un refus d’indemnisation de la DIRECCTE est à envisager. Des précisions sont attendues sur ce point.
Pour le reste, les sanctions usuelles sont précisées par le cabinet ELLIUPSE Avocats :
“Seule l’absence de mise en place du CSE (et dans ce cas seulement) est envisagée par le législateur comme susceptible de sanctions. L’entrave à la constitution du CSE ou à la libre désignation de ses membres est ainsi punie d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 7 500 € (C. trav., art. L. 2317-1). Tout salarié pourra également réclamer l’allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’absence de représentation du personnel”
“Dans le même sens, une organisation syndicale ayant sollicité l’organisation des élections pourra également voir l’employeur condamné à lui verser des dommages-intérêts en raison de la faute commise du fait de l’absence d’organisation des élections (Cass. soc., 7 mai 2002, n° 00-60.282). Au-delà des sanctions légales fixées par le Code du travail, l’absence de CSE aura également des conséquences en particulier lorsque des informations-consultations sont obligatoires.”
Christophe PATTE