L’évolution sociétale est là, qui pousse les entreprises à sortir des anciens modes de management pour aller vers plus de collaboration. Cisco France fait partie des entreprises qui réinventent la posture managériale en tablant sur la coresponsabilité.
« La coresponsabilité en management est une véritable tendance de fond qui va bien au-delà de l’effet de mode, qui pousse les entreprises à sortir du système traditionnel top-down pour aller vers des systèmes autoportants », explique Laurence Saunder, administrateur au sein de Syntec Conseil en Management et dirigeante de l’IFAS. L’évolution sociétale est là, les entreprises sont obligées de suivre ce mouvement de remise en cause des modes de fonctionnement lié aux nouvelles technologies, qui prône la dynamique et l’intelligence collective.
Des dirigeants prêts à lâcher du lest en termes de contrôle, une condition sine qua non
La coresponsabilité appliquée au management ne se décrète pas, il faut créer ses conditions. « Cela implique d’abord que les dirigeants soient au clair avec ce qu’ils ont eux-mêmes à lâcher en termes de contrôle. Ce n’est pas si simple mais faire évoluer les modes managériaux ne peut se faire que si les dirigeants sont convaincus », pointe Laurence Saunder, convaincus que plus de performance passe par plus de bien-être et de sens au travail. Et pour éviter l’anarchie, il faut que les salariés s’approprient en amont les enjeux globaux de l’entreprise. Ce recul du contrôle au profit du leadership suppose notamment de repenser les modèles d’évaluation. « Si l’on veut de la coresponsabilité, il faut réintroduire du collectif dans les systèmes d’évaluation, réfléchir à la question du reporting », ajoute-t-elle.
D’Outre-Atlantique nous viennent des exemples comme Google, Gore-Tex, Zappos, qui proposent des modes de management alternatifs, il en existe aussi dans l’Hexagone. Cisco France a ainsi abordé le sujet sous un angle de stratégie business et lancé il y a cinq ans un programme pour accompagner une transformation de ses métiers et de sa gouvernance. Piloté depuis la direction générale et non par les RH, « ce programme a été positionné comme un projet d’entreprise, intégré à sa culture », précise Hélène Sancerres, directrice conduite du changement, coaching et RSE chez Cisco France.
La motivation intrinsèque du salarié
La dimension relationnelle et celle du sens au travail jouent un rôle important dans l’évolution des modes managériaux. Nous l’avons dit plus haut, la coresponsabilité ne se commande pas, « on s’appuie dans ce cadre le ressort de la motivation intrinsèque des salariés », explique Laurence Saunder. Avec Cisco France, il s’agissait, au travers d’un travail sur les comportements, de créer une culture d’objectifs partagés où la prise de décision est transparente, où le leadership impulsé induit de nouvelles postures managériales, où les ressources sont mutualisées ainsi que la responsabilité. Si l’on encourage par exemple la prise de risque sans reprocher l’échec qui peut s’ensuivre, on donne le droit à l’erreur, on soutient.
Cisco France : d’une culture de compétition à une culture d’objectifs partagés
En vingt-cinq ans, Cisco est passée d’un statut de startup à celui de grande entreprise organisée. Comment faire pour accélérer tout en gardant ces deux piliers ? telle était la question qu’elle s’est posée ces dernières années. En France, l’entreprise a voulu accompagner une transformation de ses métiers et de sa gouvernance d’un changement de comportements, « avec un chapeau de coresponsabilité – cela impliquait de passer d’une culture de compétition à une culture d’objectifs partagés », explique Hélène Sancerres, directrice conduite du changement, coaching et RSE chez Cisco France. Il a fallu déterminer les comportements prioritaires à mettre en place, précise-t-elle. Pour réinventer la posture managériale et aller du command & control à un management plus partagé et collaboratif, managers et collaborateurs ont travaillé, individuellement et collectivement, sur la définition de ces comportement et sur la façon de les concrétiser.
Ce programme permet de mettre en lien l’agilité comportementale, qui concerne l’individu et qui est un atout d’employabilité indéniable, et le collectif ainsi que ses enjeux business pour que cela fasse sens pour l’individu. « Si l’on veut par exemple atteindre ses objectifs, il faut prendre des risques et prendre des risques ne signifie pas la même chose d’un individu à l’autre », souligne Hélène Sancerres. Les managers formés par l’IFAS ont accompagné les collaborateurs dans ce travail. Avec 350 collaborateurs en France, il n’aurait était ni réaliste ni rentable que chacun soit accompagné au quotidien par un consultant. De plus, pour Hélène Sancerres, sur un tel sujet, « il n’y a que la systémique qui marche et nous avions plus de marge de manœuvre en intégrant ce dispositif dans un processus managérial ». Ce qui importait n’était pas de mettre tout le monde à un top niveau mais que chacun soit sur un chemin de progression. Une politique du petit pas qui dit l’importance des changements dans une organisation imprégnée jusque-là d’une culture du dépassement. « Sur ces sujets comportementaux, prendre du temps est nécessaire », insiste-t-elle.
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Sophie Girardeau