Dans un secteur soumis à de fortes variations saisonnières, Nextories a fait le pari de l’annualisation du temps de travail. Ce dispositif, souvent perçu comme complexe ou contraignant, est ici devenu un levier d’agilité, de performance et d’attractivité RH. Retour d’expérience sur une organisation repensée à l’échelle collective, où flexibilité rime avec engagement.
Chez Nextories, l’annualisation du temps de travail n’est pas née d’une contrainte, mais d’une intuition partagée. Celle d’un modèle plus fluide, plus juste, pour répondre à la saisonnalité du secteur sans épuiser les équipes. Sophie Ronen, DRH, a porté cette dynamique avec méthode.
Dès le départ, l’entreprise a misé sur la concertation. Organisation du travail repensée, planification ajustable, SIRH renforcé : chaque levier visant à conjuguer performance économique et qualité de vie au travail.
Alors, comment l’entreprise a-t-elle mis en œuvre l’annualisation du temps de travail ? Quels ajustements ont été nécessaires pour embarquer les équipes ? Et de quelle façon cette stratégie a-t-elle renforcé son attractivité RH ? C’est ce que nous allons voir.
Expérimentation de l’annualisation du temps de travail chez Nextories
L’annualisation : une réponse pragmatique à la saisonnalité
Chez Nextories, la saisonnalité du marché du déménagement est structurelle. Le volume d’activité varie fortement selon les mois. Cette réalité a poussé l’entreprise à revoir son organisation du temps de travail pour gagner en agilité, tout en préservant l’équilibre collaborateurs/entreprise.
En 2024, un accord d’entreprise est ainsi conclu afin d’expérimenter l’annualisation du temps de travail. Objectif : adapter les horaires aux pics d’activité sans alourdir inutilement les périodes creuses.
L’idée de départ est simple. Pendant les mois forts, les équipes travaillent davantage. En contrepartie, elles peuvent récupérer des heures ou des jours de repos sur les périodes moins denses. Une logique de flexibilité bilatérale donc, pensée en collaboration avec les équipes.
Une mise en œuvre progressive et coconstruite
Bien entendu, Nextories ne généralise pas le dispositif du jour au lendemain. Une phase pilote est mise en place auprès d’un échantillon de collaborateurs volontaires, expérimentés et représentatifs. Des entretiens sont menés pour ajuster les volumes horaires acceptables, semaine par semaine, en tenant compte des contraintes individuelles et collectives.
Deux formats émergent de cette concertation : un « pack standard » à 20 heures annuelles supplémentaires et un « pack booster » à 25 heures. Le premier est requis pour l’ensemble des collaborateurs concernés. Le deuxième, facultatif, permet d’obtenir des avantages supplémentaires, tels que des journées de congé additionnelles.
Cette logique de pack visait à proposer un cadre structurant tout en laissant une marge de choix aux collaborateurs. L’enjeu était aussi de reconnaître l’engagement de ceux qui s’investissent davantage, sans stigmatiser ceux qui s’en tiennent à un rythme plus classique.
Des règles claires pour une souplesse maîtrisée
L’implémentation a nécessité un suivi RH renforcé. Chaque mois, un planning d’heures est communiqué, puis réajusté selon les besoins. La DRH souligne le rôle clé de l’outil SIRH, mis à jour en parallèle, pour fiabiliser cette organisation et automatiser certaines tâches administratives.
Côté rémunération, la stabilité a été privilégiée. Le fixe reste le même sur toute l’année, quelle que soit la saison. En revanche, le variable — commissions et primes — reste indexé sur la performance, avec un système de paliers progressifs et des « boosters » pour récompenser les efforts sur la période haute.
Ce modèle incitatif a suscité une vraie adhésion : certains collaborateurs ont d’ailleurs atteint des niveaux de rémunération inédits grâce aux heures supplémentaires réalisées.
Bénéfices et impacts de l’annualisation du temps de travail
Moins d’absentéisme, plus d’implication
S’ils sont encore en cours d’analyse, les résultats sont déjà tangibles sur les KPIs RH. À titre d’exemple, le taux d’absentéisme a baissé, comparé à l’année précédente. Les équipes semblent plus impliquées et motivées à fournir un effort ciblé quand cela a du sens pour elles.
L’annualisation a permis de redonner du sens au temps de travail. On a observé une vraie appropriation du dispositif par les collaborateurs, avec une montée en puissance progressive de l’adhésion.
Le système a aussi permis de désamorcer certaines craintes. Notamment celles liées à la perte de rendez-vous commerciaux pendant les périodes de récupération. Car, en réalité, la concentration des missions sur des plages horaires plus courtes a stimulé la productivité individuelle.
Un levier d’attractivité assumé
Loin d’être un frein, l’annualisation est devenue un argument d’attractivité. En particulier pour des profils commerciaux sensibles aux logiques de performance et de rémunération évolutive. En toute logique, l’entreprise intègre aujourd’hui ce fonctionnement dès le processus de recrutement.
Cette culture du « temps agile » s’est ancrée dans les pratiques, portée à la fois par le discours managérial et les retours d’expérience internes. Les premiers testeurs sont devenus les meilleurs ambassadeurs du dispositif auprès de leurs collègues.
Annualisation du temps de travail : enjeux et perspectives pour les fonctions RH
Pour Sophie Ronen, l’annualisation a marqué un tournant. Non pas une révolution, mais une réingénierie du pilotage du temps. Les outils RH, la relation managériale et la gestion prévisionnelle des activités ont été réinterrogés en profondeur.
Ce changement de paradigme a nécessité rigueur, pédagogie et écoute. Il a aussi permis de mieux structurer l’approche RH autour de la flexibilité et de la responsabilisation. De fait, l’annualisation s’inscrit véritablement comme un levier de transformation interne.
En parallèle, Nextories entame aussi une modernisation de ses outils de gestion RH. Un nouveau SIRH est en place depuis 2024, intégrant certaines briques d’intelligence artificielle. L’ATS à venir devrait également embarquer des fonctions d’IA pour faciliter le tri des candidatures.
Pour autant, l’entreprise reste prudente sur le sujet. L’objectif de décharger les équipes des tâches chronophages, sans déshumaniser les processus.
Prochaine étape ? Renforcer encore la capacité d’anticipation RH, en s’appuyant à la fois sur les données de terrain et les retours collaborateur.
Loin d’être un simple aménagement organisationnel, l’annualisation du temps de travail chez Nextories a agi comme un révélateur. Révélateur d’une culture managériale ouverte, d’une organisation à l’écoute et d’un engagement salarié renforcé. Ce retour d’expérience montre qu’avec méthode et dialogue, flexibilité et stabilité peuvent coexister. Pour les RH, le message est clair : l’enjeu n’est pas de faire plus, mais de faire mieux, ensemble. À l’heure où les attentes évoluent, et où la quête de sens redessine les priorités, repenser le temps de travail devient une vraie opportunité stratégique pour l’engagement, la QVCT et, bien entendu, l’attractivité.